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fatigues de la campagne ne l’en dégoûtèrent pas ; mais, témoin attentif des événemens qui s’agitaient dans une sphère plus haute, il conçut le désir d’être soustrait aux devoirs monotones de la vie de régiment et de prendre place au nombre des officiers politiques de la compagnie. Ce titre d’officiers politiques s’appliquait, comme on sait, aux diplomates dans la phraséologie anglo-indienne. Il vaut la peine de faire observer que la diplomatie est en Orient une besogne plus rude qu’en Europe. Elle expose un homme à tous les dangers de la vie militaire sans le couvrir des mêmes protections. Elle le met seul et sans appui en présence de peuples barbares qui ne se soucient guère des subtilités de notre droit des gens. En temps de paix, l’officier politique séjournait en qualité de résident auprès des princes natifs ; il représentait la compagnie à leur cour, et le plus souvent s’immisçait dans les détails les plus intimes du gouvernement indigène. C’était alors plutôt un administrateur qu’un diplomate. En temps de guerre, il suivait l’armée, conduisait les négociations, levait les réquisitions en pays conquis, et contrôlait dans une certaine mesure les opérations militaires. Les fonctions de ce genre étaient faites pour tenter les ambitieux, d’autant plus que l’ancienneté était la règle rigoureuse d’avancement dans les cadres de la compagnie, et que les officiers ne pouvaient se soustraire, quels que fussent leurs mérites et l’éclat de leurs services, aux ennuis d’un long séjour dans les grades inférieurs. Les emplois diplomatiques faisaient avancer vite au contraire, pourvu que l’on eût la chance d’échapper aux accidens du métier et aux fâcheuses conséquences d’une vie perpétuellement active sous un climat brûlant. La première condition pour être admis dans le département politique était la connaissance des langues indigènes. Malcolm apprit le persan en même temps qu’il étudiait les anciennes histoires de l’Inde et les origines de la puissance anglaise dans ce pays. Peu de temps après, ces studieux efforts eurent leur récompense ; il obtint un de ces emplois qu’il sollicitait avec ardeur. Il comptait déjà neuf années de présence sous les drapeaux de la compagnie, tantôt dans des régimens européens, tantôt dans des corps indigènes, sans avoir jamais pris une semaine de congé. En 1792, au siège de Seringapatam, lord Cornwallis, alors gouverneur-général de l’Inde, le désigna comme interprète persan du contingent fourni par le Nizam, en lui disant que personne n’était plus capable de remplir cet office. Le début était modeste ; ce n’était qu’un premier échelon où Malcolm devait avoir occasion de fournir la mesure de sa capacité. Par malheur, les effets du climat commençaient à se faire sentir sur lui, sa santé déclinait. Les médecins lui conseillèrent de retourner pour quelque temps dans son pays natal. Cédant aux in-