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Je ne donne que le tracé et le canevas : on sent ce que le développement complet peut y ajouter de fécond et ce qu’eût été surtout à la tribune un tel mouvement, un tel motif, d’une grande et habile hardiesse, côtoyant et frisant en quelque sorte l’écueil, allant en apparence donner dessus avec une imprudente confiance, et l’enveloppant, le tournant de toutes parts, le serrant de plus en plus près sans s’y briser.

Je distingue dans les pages suivantes un beau mouvement encore à l’occasion de l’armée, car chez Camille c’est l’orateur à tout instant qui reparaît et palpite dans l’écrivain. On avait accusé les représentans proscrits de n’avoir pas assez pris en main les intérêts de nos armées, de ne s’être pas souciés de leurs besoins ni de leur gloire, de s’être méfiés de leur intervention dans la politique, et en dernier lieu de leur approche. Il réfute une partie de ces accusations. « Il est vrai, dit-il, que nous nous plaignîmes qu’une colonne de troupes eût osé franchir la limite constitutionnelle. Il est vrai que nous préparions une loi répressive contre les délibérations et les adresses émanées des armées. » Mais était-ce donc une crainte si vaine et si chimérique dans la circonstance ? Et c’est ici que surgit un nouvel élan, un nouveau jaillissement oratoire :


« La triste expérience du passé ne devait-elle pas ajouter à nos craintes ? Ne devait-il pas être présent à nos pensées, le souvenir de tant d’excès auxquels purent se porter des soldats égarés ? Qui, à l’époque du 31 mai, fut l’espoir et l’appui des plus exécrables tyrans ? Des soldats. — Qui leur prêta son bras pour courber sous un joug de fer une nation indignée ? Des soldats. — Qui vint combattre sous vos murs, ô mes concitoyens, les derniers et sublimes efforts de la liberté mourante, incendier vos habitations, massacrer votre jeunesse, présider aux plus féroces exécutions, tomber le sabre à la main sur des malheureux échappés aux mitraillades ? Des soldats. — Qui, par tout le reste de la France, fit couler aux cris redoublés de vive la liberté ! des torrens de sang français ? Des soldats. — Qui, même après le 9 thermidor, quand l’humanité se réveillait dans tous les cœurs, reprit encore au premier signal ces habitudes de carnage, et, répondant par des coups de canon aux justes représentations d’un peuple libre, porta de nouveau dans les murs de Paris l’épouvante et la mort ? Encore des soldats. — Mais comment des soldats ? Peut-être quelques individus ? Non, des bataillons entiers. — Ils étaient abusés, direz-vous. J’aime à le croire ; mais enfin des hommes qui furent abusés au point d’étouffer, etc.. »


Il y aurait bien quelque chose à répondre à cette philippique contre les armées de la révolution, à revendiquer leur vrai rôle et l’esprit qui les animait, si c’était ici le lieu. Du reste la pensée