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Bohême et la Moravie, — l’Autriche, — le Tyrol, — la Carinthie, — la Carniole et Trieste ; — la Dalmatie, la Croatie et la Sîavonie. Chacun de ces états aurait joui d’une autonomie complète pour ses affaires intérieures. Les objets que les Hongrois eux-mêmes admettaient comme d’intérêt commun auraient été seuls réservés à la diète centrale. Ce système est certainement le plus équitable, le plus rationnel, le seul qui puisse satisfaire, semble-t-il, toutes les nationalités, sans trop affaiblir l’unité de l’empire ; mais les Allemands le repoussaient, et les Hongrois n’en voulaient à aucun prix. On aboutissait donc de nouveau à un inévitable échec, quand la guerre avec la Prusse vint appeler l’attention sur un autre théâtre.

La paix faite, il était plus urgent que jamais de reconstituer l’Autriche, ébranlée jusque dans ses fondemens. Le ministère Belcredi, entraîné, dit-on, par l’éloquence du comte Andrássy et par l’influence de l’impératrice, crut, non sans raison, que le temps était venu de se réconcilier avec les Hongrois. On leur accorda le ministère responsable qu’ils réclamaient, et il fut entendu que l’autonomie des pays de la couronne de saint Etienne serait reconnue, mais qu’un accord interviendrait pour déterminer comment à l’avenir se régleraient les affaires communes aux deux moitiés de l’empire.

Dans le manifeste de septembre, l’empereur avait promis que le projet de constitution qui sortirait des délibérations des diètes hongroises et croates serait soumis aux diètes des pays cisleithans. Ces dix-sept diètes se réunirent le 19 novembre, chacune au centre de la province qu’elle représentait. Celles où dominaient les Slaves, c’est-à-dire celles de la Galicie, de la Bohême, de la Moravie, de la Carniole, auxquelles il faut joindre la diète slave de la Croatie de l’autre côté de la Leitha et celle du Tyrol, se prononcèrent contre le dualisme. Les diètes où les Allemands avaient la prépondérance condamnèrent la suspension du régime constitutionnel et réclamèrent le rétablissement du reichsrath. Le 2 janvier 1867, une nouvelle patente impériale convoqua pour le 25 février un « reichsrath extraordinaire, » c’est-à-dire une sorte d’assemblée constituante qui devait avoir pour mission de discuter le projet d’accord (l’Ausgleich) préparé en ce moment par la diète hongrois. La convocation était signée par le comte Belcredi et par M. de Beust, récemment nommé ministre des affaires étrangères. Cette transaction avait pour but de satisfaire les Slaves, et elle fut favorablement accueillie en Galicie, en Bohême et en Moravie ; mais elle mécontenta les Hongrois d’abord, parce que cette constituante n’aurait jamais accepté leur programme dualiste, et les Allemands ensuite, parce que dans cette assemblée de 203 membres 120 au moins auraient voté pour le fédéralisme. L’opposition devint si vive à Vienne