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découvert, mais elle égalait au moins en superficie la capitale de l’Angleterre. Les rues de Babylone étaient, au dire d’Hérodote, généralement droites, bordées de maisons à plusieurs étages. De ces rues, les unes s’allongeaient parallèlement au fleuve, les autres aboutissaient et donnaient accès sur le bord par des portes en bronze. Le nombre des édifices qui décoraient la ville de Nabuchodonosor, que ses successeurs embellirent encore, paraît avoir été considérable ; les inscriptions en mentionnent une multitude. Le monarque habitait un magnifique palais situé hors du lieu où s’était élevée la résidence de son père, et dont les ruines encore subsistantes portent le nom de Kasr. Bérose rapporte qu’il fut élevé en quinze jours, ce que confirment les textes épigraphiques. Les jardins suspendus, dont la création était attribuée à Sémiramis, sont connus de tout le monde. Cette merveille a disparu, mais l’emplacement a pu en être déterminé, grâce aux tombeaux que les Grecs, au rapport des auteurs, y avaient établis et qui ont été retrouvés. Le grand tumulus de Tell-Amran occupe le lieu de ces admirables terrasses. Quant aux temples, j’en parlerai plus loin.

Telle était la ville dont Cyrus se rendit maître, qui redevint un instant indépendante et à deux reprises différentes retomba sous le joug perse. Les noms des derniers monarques qui exercèrent dans Babylone une autorité toujours menacée ont été déchiffrés, ainsi que ceux de leurs plus illustres prédécesseurs : Nabounahid (Nabonid), le Labynète d’Hérodote, Belsaroussour, le Balthasar ou, pour prendre la véritable forme hébraïque, le Belsassar de la Bible, à qui les inscriptions donnent pour père et prédécesseur un prince appelé Nabouintouk, passé sous silence par les auteurs grecs et latins. Même après qu’elle eut été dépouillée de son privilège de capitale, la cité chaldéenne conserva encore son auréole de grandeur et de magnificence. Antique sanctuaire du paganisme asiatique, elle était, comme la Rome païenne, à la fois une ville sainte et une ville de plaisirs ; ses rois y avaient accumulé autant de témoignages de leur faste que de leur piété.


IV

Cette religion babylonienne, objet pour les Juifs d’une aversion profonde, et qu’ils regardaient comme la plus honteuse des idolâtries, a reçu des textes cunéiformes un précieux commentaire. Nous possédions déjà sur la cosmogonie, sur l’astrologie des Chaldéens des renseignemens assez circonstanciés, mais nous ignorions la riche composition de leur olympe. Les auteurs grecs, en nous parlant du culte assyrien, avaient d’ailleurs souvent substitué, selon