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voyageurs n’aille pas jusqu’à permettre à ces derniers d’introduire dans les wagons des paniers, des malles, qui sont une cause permanente de gêne pour tout le monde et occupent au moins la place d’une personne. Le fourgon des bagages est fait pour ces sortes de colis, et c’est un insupportable abus que d’en laisser encombrer les voitures. Il est certain que l’avenir modifiera singulièrement le matériel des voies ferrées et lui donner à des facilités qu’on ne prévoit pas encore. Les voyages gagneront en rapidité et en agrément, lorsque l’on pourra circuler sans péril d’un wagon à un autre, et qu’un restaurant sera attaché à tout convoi devant parcourir une certaine distance. L’Allemagne tente aujourd’hui cette dernière expérience ; nous saurons donc bientôt si elle peut définitivement entrer dans l’exploitation.

Les tarifs pourront être abaissés, et les chemins de fer subiront sans doute un jour une réforme analogue à celle qui a atteint et enrichi l’administration des postes. En cette matière, fort délicate à traiter en France, car elle touche aux intérêts financiers de tout le monde, l’exemple vient d’être donné par le gouvernement belge, qui le pouvait sous sa propre responsabilité, puisque là les chemins de fer ont été construits par l’état. La différence qui existe, depuis la loi votée à Bruxelles le 1er mai 1866, entre le tarif belge et le tarif français est considérable, et sera vite expliquée par un exemple : Paris est séparé d’Orléans par une distance de 121 kilomètres, le prix des places est de 13 fr. 55 c. pour les premières, 10 fr. 15 c. pour les secondes et 7 fr. 45 c. pour les troisièmes. — Entre Bruxelles et Ostende, il y a 124 kilomètres ; les premières coûtent 5 francs, les secondes 3 fr. 50 c, les troisièmes 2 fr. 50 c. — Si nos compagnies adoptaient une réforme aussi radicale, on irait de Paris à Marseille pour 20 francs, et l’on rendrait à la population peu aisée, c’est-à-dire à la majeure partie de la population, un service inexprimable. Nous verrons peut-être un tel fait se produire, mais tant d’intérêts légitimes et sérieux sont engagés au maintien de l’ordre de choses actuel que nous attendrons longtemps encore avant de voir les chemins de fer français s’engager, à leurs risques et périls dans une voie si hardie. Du reste, l’expérience tentée en Belgique semble ne pas donner de bons résultats, et il ne serait pas surprenant qu’on en revînt purement et simplement aux anciens tarifs.

Cette étude ne serait pas complète, si, avant de terminer, je ne disais un mot d’essais très sérieux qui se font en ce moment même, et dont le but est de prouver que la traction mécanique est possible sur les routes ordinaires. Dès le début des machines à vapeur, on se le rappelle, tous les efforts des inventeurs avaient