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ou à certaines stations désignées, ou qu’il est haut le pied, c’est-à-dire qu’il ramène le matériel vide. Il faut enfin faire la répartition du travail des employés dans la gare, afin d’assurer le service et de savoir au besoin à qui faire remonter la responsabilité d’une faute ou d’une erreur. On divise les employés en autant de groupes qu’il y a de lignes spéciales : Versailles, un groupe ; Saint-Germain-Argenteuil, un autre groupe et ainsi de suite. On les désigne par leurs noms et par leurs fonctions ; on écrit le nombre d’heures de travail effectif qu’ils doivent, on délimite avec soin leurs attributions, et dans des notes on leur adresse les recommandations particulières que comporte leur travail de tel ou tel jour, de telle ou telle heure. Le graphique, le roulement du matériel, la répartition du travail, sont le comble de la prévoyance. Ces trois documens sont remis au chef de gare, qui est chargé de faire exécuter les prescriptions qu’ils contiennent et dont chaque employé intéressé peut prendre connaissance. Ainsi, quand un train part, il a, comme un régiment qui change de garnison, sa feuille de route expliquant toutes ses étapes et le temps qu’elles doivent durer. Les communications rapides de l’électricité ont apporté une force de plus au commandement et à la direction. Aussitôt qu’une irrégularité quelconque se manifeste, on en informe qui de droit ; des renseignement, des instructions, sont transmis dès qu’on peut soupçonner qu’ils auront quelque utilité pour le service. Chaque gare a un employé spécial chargé du service télégraphique, et celle de l’Ouest (rive droite) a pendant l’année 1867 échangé 43,901 dépêches relatives à l’exploitation du chemin de fer.

Muni des documens émanés de la direction du mouvement, et dans lesquels, comme nous venons de le voir, il peut lire tous les ordres concernant ses fonctions, le chef de gare a pour mission de veiller à la formation des trains, qu’il fait ranger, selon la destination, contre un des quais qui servent au départ et à l’arrivée (à l’Ouest, il y en a 20). Il surveille l’installation des voyageurs, fait décomposer le train parvenu à terme de voyage, après qu’on a relevé le numéro d’ordre de chaque wagon et vérifié si les, voyageurs n’ont rien oublié dans les voitures ; enfin il commande les trois cent quatre-vingt-neuf employés qui font le service de son domaine particulier.

Lorsque, tournant le dos au souterrain à triple tunnel qui passe sous le boulevard des Batignolles, on aperçoit l’ensemble de la gare[1], on reconnaît qu’elle a presque la forme d’une immense mandoline dont les rails seraient les cordes, et dont les poteaux

  1. Le soir, la gare est éclairée par plus de 800 becs de gaz, et dans les temps de service exceptionnel par 1,100.