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En chasse, le jour, quand la trompe
Active les pesans galops,
La nuit, quand pleurent les bouleaux
Sous la brume qui les estompe ;

Tous ces Walpurgis, ces chemins
Incriminés d’horreurs notoires,
Fantastiques laboratoires
De maléfices surhumains,

N’ont rien de la morne épouvante
De ces vastes parcs frissonnans,
Où défilent les revenans
De l’histoire toujours vivante.

Que m’importe de voir les pas,
Gravés dans le sable ou la roche,
D’un diable narquois et bancroche
Auquel ma raison ne croit pas ?

Que m’importent la mandragore
Et les incubes ses neveux ?
Je m’en amuse, si je veux,
Sinon je passe et les ignore.

Mais, sous ces vieux ifs où se plaint
La voix du passé qui se montre,
Comment éviter la rencontre
Du souvenir qui vous étreint ?

Comment fuir la mélancolie
Des vaines choses d’ici-bas ?
Comment ne point voir sous ses pas
La trace de ce qu’on oublie ?

Ainsi dans ces parcs bien souvent,
Même en voulant ne pas les suivre,
Mes yeux ont vu passer et vivre
Ces ombres que chasse le vent !

Ombres chères et misérables,
Toutes, à leurs fronts pleins d’attrait,
Portant l’indélébile trait
Des lassitudes incurables !

Toutes, d’un vol endolori,
Glissant, pâles énamourées,