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qui ne semble dater que de dix-huit siècles. C’est de toutes les religions celle dont les vraies origines peuvent être le plus facilement et le plus sûrement reconnues. Quoique son premier siècle ne nous ait laissé que peu de livres et qu’elle-même n’ait eu pendant de longues années qu’une existence sociale mystérieuse et péniblement soutenue, nous avons trois sources de documens tels que n’en a laissé aucune des religions de l’antiquité : ce sont les rituels, les dogmes écrits ou discutés et les monumens figurés, dont les catacombes de Rome offrent à elles seules une collection presque inépuisable. Jusqu’à présent les dogmes chrétiens sont la seule de ces trois choses dont la science ait tenté d’établir l’origine. Quant aux rites, nous ne sachons pas qu’ils aient fait l’objet d’aucune étude ayant un caractère scientifique. Enfin l’archéologie chrétienne n’a guère remonté jusqu’à présent au-delà des premiers temps du christianisme, de sorte que l’origine de presque tous les symboles figurés est encore à trouver. Toutefois il est bon de remarquer que les rites et les symboles ne sont jamais que l’expression sensible de la doctrine, et que par conséquent ils cheminent avec elle à la surface de la terre et partagent sa destinée. La doctrine nécessairement les précède, puisque sans elle ils n’auraient aucune signification, aucune valeur, aucune autorité, et sembleraient des chimères. Plus tard au contraire, il arrive que par l’enseignement les rites et les symboles se transmettent encore lorsque déjà la doctrine est oubliée, et qu’ils continuent de régner en vertu de la puissance mystique que la doctrine primitive leur avait communiquée. La grande question des origines s’applique donc principalement aux dogmes ; quand l’origine des dogmes est découverte, on peut dire que celle des rites et des symboles est bien près de l’être. Or aujourd’hui l’on constate que les dogmes chrétiens existaient longtemps avant l’époque de Jésus, incomplètement ou en secret chez le peuple juif, pleinement et ostensiblement chez les Perses. On assiste aux tentatives qui furent faites successivement depuis le temps de Darius et de Xerxès pour introduire les dogmes aryens dans le monde hellénique, tentatives qui eurent lieu tour à tour dans la Grèce en pleine Athènes, puis en Égypte au temps des Ptolémées, et qui ne réussirent que quand l’équilibre des idées put être rompu au profit des croyances perses. Ce temps fut celui où parut en Judée le Maître qui fonda la religion du Christ.

Nous prions le lecteur de remarquer que dans ce qui précède la science ne fait point de polémique, et que nous exposons simplement les résultats les plus sûrs et les plus généraux de l’érudition. Ils ne blessent pas plus la religion chrétienne que les autres religions, puisque, loin de vouloir ôter à aucune d’elles les caractères qui lui