Page:Revue des Deux Mondes - 1868 - tome 74.djvu/1006

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Comment sont-ils arrivés sur le continent de l’Europe ? quels chemins ont-ils suivis ? C’est là une question importante, mais secondaire, qui n’est point encore résolue, bien qu’il soit déjà visible que la Crète, les îles de l’Archipel et les pays au nord de la Grèce ont été comme trois routes qui ont conduit les dieux sur la terre des Hellènes. Quoi qu’il en soit, il n’est pas un savant aujourd’hui qui n’affirme que la distinction toute récente encore faite par l’archéologie entre les dieux des Pélasges et ceux des Hellènes est illusoire et ne répond pas à deux périodes que l’on puisse historiquement séparer. Chaque année qui s’écoule voit quelqu’un de ces dieux rattaché à son origine par des liens qu’il n’est plus possible de méconnaître. Cette origine n’est pas égyptienne, elle est asiatique, et en Asie ce n’est ni chez les Sémites, ni même chez les Indo-Perses qu’on la trouve, c’est dans un centre plus antique, primitivement occupé par la race aryenne, et d’où les Perses, les Indiens et les Grecs sont également venus.

De ce même centre sont parties, soit à deux époques différentes, mais peu écartées, soit peut-être en même temps, les religions de la Perse et de l’Inde. Cette origine commune des deux grands systèmes religieux de l’Asie a été mise en lumière par les travaux des orientalistes et des critiques de nos jours. Non-seulement les analogies les plus frappantes existent entre les doctrines et les symboles les plus anciens de l’Avesta et du Vêda, mais le premier de ces deux livres sacrés a conservé le souvenir de l’origine septentrionale du mazdéisme persan. De plus, il est possible de reconnaître en lui un recueil d’écrits appartenant à des époques différentes, et l’étude des fragmens les plus anciens montre une identité presque complète entre les doctrines religieuses qu’ils renferment et celles qui sont contenues dans le Vêda. Cependant il n’y a aucune raison de penser que la doctrine attribuée à Zoroastre tire son origine de ce dernier ; il faut donc admettre que l’un et l’autre sont issus d’une source commune. Cette source, l’Avesta la nomme et en donne la situation géographique[1]. Les hymnes du Vêda n’en parlent pas ou n’y font que des allusions équivoques ; mais les commentaires du Vêda, qui sont eux-mêmes d’une époque reculée et en langue védique, sont plus explicites et nous montrent les populations aryennes de l’Inde venant du nord-est avec leurs croyances et leurs dieux. Ces dieux sont ceux-là mêmes que l’on retrouve dans le livre de Zoroastre, et la notion métaphysique qui anime ces figures est aussi la même. Plus la science pénètre ces matières encore nouvelles, plus la commune origine du parsisme et du brahmanisme se

  1. Il la place aux pays de Çugda et Bâgdhi, qui sont la Sogdiane et la Bactriane.