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progrès, il n’aurait aucun besoin d’entrer en relations commerciales avec les Européens. Par sa forme allongée et étroite, il touche, avec une surface relativement peu considérable, d’un côté aux frimas du nord et de l’autre aux chaleurs des tropiques. Dans Yeso, nous trouvons le climat de la Norvège, ses neiges continuelles de l’hiver, sa nature sauvage, ses arbres résineux et aussi les grandes pêcheries de saumons dont les produits se répandent à profusion au sein des provinces les plus reculées de l’empire. Le détroit de Tsangar franchi, nous sommes sur la grande île de Nipon, au milieu d’une végétation semblable à la nôtre, mais qui pousse beaucoup plus hardiment, grâce aux ardeurs excessives du soleil et aux pluies torrentielles de l’été. Le riz, la vigne, le mûrier, croissent en abondance, et sont cultivés avec un soin extrême ; le blé, qui a remplacé le riz aux environs de quelques grandes villes, s’étend en sillons étroits, délivré par la main du cultivateur de toutes les plantes parasites qui pourraient l’étouffer ; sur les montagnes, boisées du haut en bas, les plus belles essences se touchent dans des fouillis qui prennent parfois des aspects sauvages de toute beauté. Les marronniers et les camphriers atteignent des dimensions considérables. Le long des habitations et des routes, des bois de bambous fournissent à l’industrie les matières premières de mille objets d’art et d’ameublement, tandis que pour le voyageur ils s’unissent aux arbres résineux, aux camphriers, aux camélias, et donnent à la campagne un aspect des plus rians pendant l’hiver. Partout le sol est riche, couvert d’une épaisse couche de terre végétale produite par les détritus de toute nature que les pluies entraînent des plateaux boisés. Aux alentours des villes, la culture maraîchère prépare pour le marché tous nos légumes d’Europe sous des formes et des dimensions quelquefois différentes. En descendant sur les rivages de la mer intérieure, les plantations de thé s’étagent le long des collines, le tabac et le coton s’étendent au loin dans les plaines ; sur l’île de Kiusiu, l’oranger domine avec ses variétés infinies ; enfin à l’extrémité de l’empire, chez le prince de Satzouma, le riche propriétaire des îles Lioutchiou, se cultive la canne à sucre, dont les produits, peu recherchés aujourd’hui, acquerraient une parfaite pureté sous l’action énergique de nos raffineries. Les richesses minéralogiques abondent dans l’ouest. La houille y est commune, et, si la qualité en est médiocre, ce défaut tient surtout à l’exploitation actuelle, qui n’attaque encore que les couches supérieures. L’argent suffit et au-delà à tous les besoins de la circulation monétaire ; l’or, dont on a trop poussé l’extraction au dire des Japonais, n’avait à poids égal, à notre arrivée dans le pays, que six fois la valeur de l’argent ; le cuivre enfin est à bas prix et entre