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ville populeuse. Les fondations des piliers qui portent leurs têtes de granit dans les salles d’observation sont isolées et garanties contre la transmission du mouvement ou de la chaleur par un système de murs et de voûtes entre-croisées qui a fait dire à M. Struve que le luxe de son observatoire était dans les souterrains. A Paris, nous sommes bien loin de ces conditions de stabilité ; cependant, autant que je le sache, on observe le nadir à Paris de temps à autre, et cela peut à la rigueur suffire pour le genre d’observations qui s’y poursuit. La comparaison des observations de Paris avec celles de Greenwich montre d’ailleurs que l’exactitude est à peu près la même de part et d’autre, les différences sont tout à fait insignifiantes. Un célèbre astronome allemand, M. Auwers, a comparé le catalogue de Paris avec la moyenne de quatorze autres catalogues choisis parmi les meilleurs ; il résulte de son mémoire que les déterminations qui ont été obtenues à Paris de 1852 à 1861 sont aussi exactes que celles qui ont été données par la plupart des bons observatoires étrangers ; celles de Poulkova, sur lesquelles on fonde de grandes espérances, n’ont pas encore été publiées.

Ce qui peut nous inquiéter, c’est que depuis quelques années la situation de l’observatoire de Paris a empiré, et que l’avenir s’annonce menaçant. Un nouveau boulevard, qui portera le nom d’Arago, va être percé au sud ; une rue transversale destinée à le réunir à la rue Saint-Jacques doit passer au sud-ouest sur les terrains de l’Observatoire, et M. Le Verrier n’a pu obtenir de l’administration municipale que cette rue fut reportée à 20 mètres plus loin : cela nuirait, lui a-t-on dit, à la symétrie. Il est enfin question d’élargir la rue Saint-Jacques en prenant sur les terrains de l’Observatoire. Dans ces circonstances, qui s’aggraveront à mesure que la vie deviendra plus active dans les quartiers du sud, la tranquillité de l’Observatoire peut paraître très compromise.

M. Le Verrier n’est pas de cet avis. Selon lui, l’exactitude des observations qui ont été publiées répond également à une autre objection. Les épaisses murailles du grand édifice s’échauffent pendant le jour et rayonnent pendant la nuit la chaleur qu’elles ont absorbée ; il en résulte des courans d’air ascendans et un mélange de couches d’inégale densité sur lesquelles les rayons lumineux glissent et trébuchent au lieu d’arriver à l’œil par une route décrivant une courbe régulière. Cet effet a lieu par les mêmes causes qui produisent le mirage, il a pour conséquence une ondulation des images qui rend l’emploi des forts grossissemens tout à fait impossible. C’est pour cette raison que les astronomes attachent une grande importance au libre aérage des pièces qui abritent les instrumens. A Poulkova, les salles d’observation sont de simples abris