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of court renferme à peu près le même personnel, qui se compose de trois élémens bien distincts : les benchers, les avocats (barristers) et les étudians (students). Les premiers, benchers, forment le conseil d’administration ; ils gouvernent les affaires de la confrérie, et l’un d’eux remplit annuellement les fonctions de trésorier. Parmi les avocats, barristers, on distingue surtout deux degrés ; le plus éminent est celui de serjeant-at-law (servions ad legem), qui est conféré par le souverain. Autrefois le sergent qui venait de recevoir son grade était tenu de donner des banquets et des divertissemens qui ont été comparés pour la splendeur aux fêtes dont on accompagne le couronnement des rois. Jusqu’au temps de Charles Ier, la coutume voulait en outre que le nouveau dignitaire se rendît processionnellement à la cathédrale de Saint-Paul et qu’il y choisit un pilier, c’était la phrase consacrée. Une telle cérémonie rappelait, dit-on, les anciennes habitudes des premiers légistes anglais, qui se postaient à côté d’un des piliers de l’église, où ils attendaient les cliens. Aujourd’hui même il est encore d’usage que le sergent, après avoir été nommé, envoie un anneau d’or à la reine, au lord-chancelier et à quelques autres personnes de distinction. Il quitte alors l’inn of court dont il était membre pour appartenir désormais à une autre société, Serjeant’s lnn ; mais auparavant il reçoit de la confrérie dont il prend congé une bourse contenant 10 guinées[1]. Au reste cette dignité menace chaque jour de s’évanouir ; les privilèges qui s’y rattachaient ont été beaucoup réduits, et plusieurs sergens envisagent avec tristesse dans un avenir prochain l’extinction de leur ordre[2], Parmi les degrés de serjeant-at-law et de barrister, le lord-chancelier choisit de temps en temps quelques avocats distingués auxquels il confère le titre de conseiller de la reine (queen’s counsel). Cette distinction est avant tout honorifique. Le conseiller de la reine porte une robe de soie au lieu d’une robe de laine noire, et s’assied sur un banc plus rapproché du fauteuil des juges. Pour le reste, ses fonctions ressemblent à celles des autres avocats. Le titre est même d’autant plus envié par les hommes ayant acquis une célébrité dans le barreau, qu’en l’acceptant ils n’engagent nullement leur indépendance. Chacun d’eux reste libre de plaider contre la couronne, dont il s’appelle pourtant le serviteur.

Dès qu’ils ont atteint ce rang, les conseillers de la reine deviennent benchers de l’inn of court auquel ils appartiennent[3].

  1. C’est une manière de dire qu’on demande à retenir ses services.
  2. Une des prérogatives à laquelle le sergent tient le plus, et à peu près la seule qui lui reste, est celle d’être appelé frère, brother, par les juges du tribunal.
  3. Les autres membres du bench sont généralement élus selon, des formes assez différentes et particulières à chaque société. Après les queen’s counsels, on admet volontiers les vieux oracles du barreau. A Lincoln’s lnn, pour entrer au bench par titre d’ancienneté, il faut avoir cinquante années d’exercice, ce qui suppose au moins soixante et onze ans d’âge. Autrefois il suffisait d’une seule boule noire pour faire rejeter le candidat ; cet usage a été modifié.