des vaincus, en un mot sans rien créer de durable. La conquête arabe fut le triomphe de la force brutale et rien de plus. Comme s’ils avaient acquis, en adoptant la loi de Mahomet, une sorte d’ubiquité, on retrouve les Arabes en bien d’autres points de l’Afrique. Sur la rive droite du Sénégal, ils sont confondus sous le nom générique de Maures avec de véritables tribus berbères. Est-ce en traversant le grand désert qu’ils sont arrivés jusque-là? Ils ont converti à l’islamisme les nègres du Soudan et du Haut-Nil; mais c’est surtout sur la côte orientale qu’ils dominent aujourd’hui, et cela s’explique par le voisinage de leur patrie d’origine. Sous l’équateur même, Zanzibar est la capitale d’un royaume arabe dont l’autorité est reconnue sur une étendue de 10 ou 12 degrés de latitude, mais sans pénétrer bien loin à l’intérieur des terres.
Ainsi des nègres sauvages et cruels, des Arabes conquérans et nomades, des peuples autochthones à sang blanc que l’invasion musulmane avait dispersés, voilà les trois élémens de population entre lesquels l’Afrique était partagée avant la venue des Européens. Les Arabes n’ont peut-être jamais aussi bien réussi que lorsqu’ils se sont trouvés en contact avec les populations noires, et en effet la morale grossière qu’ils professent, l’abus de la force, qui est leur moyen de gouvernement, conviennent à merveille au caractère nègre. Est-ce à dire cependant que la vaste région occupée par les nègres doive se civiliser par leur entremise? La cause de la civilisation n’y gagnerait rien, et d’ailleurs ils n’ont plus assez de ressort pour entreprendre des conquêtes étendues. Les Turcs, qui gouvernent l’Egypte, malgré de louables efforts de régénération, sont condamnés à l’impuissance par les mêmes causes que les Arabes. C’est aux Européens qu’il appartient de coloniser l’Afrique, de mettre en culture les terres stériles, de substituer une végétation féconde aux sables du désert et aux forêts impénétrables du littoral, de remplacer les animaux sauvages qui la peuplent par des espèces utiles à l’homme. Surtout eux seuls seront capables de régénérer les races humaines qui l’habitent; mais quelle nation européenne présentera les qualités nécessaires pour l’accomplissement de cette tâche ?
En ce moment, trois nations seulement possèdent sur les côtes d’Afrique des colonies assez importantes pour leur permettre d’exercer une influence appréciable sur le sort des indigènes. Par l’Algérie et le Sénégal, la France s’impose d’une façon invincible aux débris de la race berbère; par ses comptoirs de Corée, de la côte de Guinée et du Gabon, elle est en relations quotidiennes avec les noirs. Le Portugal a ses provinces de Mozambique et de Benguela, qui se donneraient si facilement la main d’un bord à l’autre du continent à travers les plus paisibles représentans de la race mélanienne. L’Angleterre a ses établissemens de Guinée et la splendide colo-