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l’impasse où elle est depuis six mois. Nous sommes de ceux qui pensent que les malheurs de l’Italie seraient fâcheux pour la France, que l’avortement d’une œuvre à laquelle nous avons tant contribué porterait atteinte au bon renom de la politique française en Europe. Le dernier écrit du général La Marmora, plein de courage moral, de franchise et de cordialité pour la France, est la preuve que les modérés italiens méritent d’être encouragés par les bonnes influences françaises. Des observations très senties de M. Matteucci, publiées par un journal français de Florence, confirment cette impression. La question financière est en ce moment la plus pressante. Il faut opérer de fortes économies sur les dépenses et augmenter les impôts. Les réductions des dépenses militaires, par le temps de préparatifs universels où nous vivons, ne semblent guère praticables ; mais on nous écrit que sur d’autres branches on pourrait opérer des réductions importantes. Il y a, par exemple, dans le royaume italien cinq cours de cassation ; pourquoi ne se contenterait-on point d’une seule comme en France ? Il y a 18 universités, ne suffirait-il point à l’Italie d’en posséder 5 ou 6 comme l’Angleterre ? Le nombre des lycées s’élève à 88 ; il y en aurait bien assez de 30. On compte 67 chefs-lieux de préfecture et Dieu sait combien de sous-préfets et de conseillers de préfectures. Le service irait mieux, si ce personnel de fonctionnaires était diminué. Sur les branches de dépenses que nous venons d’indiquer, on pourrait réaliser de 20 à 25 millions d’économie. On pourrait aussi diminuer le nombre des ministères et s’affranchir du système qui fait des cabinets une représentation de l’Italie géographique. On a parlé d’une taxe de 10 pour 100 sur le revenu des fonds publics. Qu’un peuple gêné, mais qui a opéré chez lui-même le classement de tous ses fonds publics, impose ses rentes, il n’y a rien à dire. Ce n’est point le cas de l’Italie. Nous n’exagérons pas en disant que le tiers au moins de sa rente est placé en France. Les créanciers étrangers, les Français, ne doivent point payer à l’Italie un impôt qui serait une conversion forcée et une violation du contrat primitif. Peut-être, pour faire valoir les droits des porteurs français, faudrait-il que leurs titres fussent marqués d’un timbre spécial. Ce qui serait d’un grand secours pour le crédit et l’ordre en Italie, ce serait quelque manifestation de franche sympathie donnée par le gouvernement français. On ne peut pas assurer la tranquillité de l’Italie, si l’on n’obtient pas de la cour de Rome des choses raisonnables qui permettraient d’utiles et paisibles relations entre la petite enclave et le grand état. Pourquoi ne permettrait-on pas aux Romains de profiter individuellement des avantages de la nationalité italienne ? Pourquoi des douanes entre les deux territoires ? Où est maintenant la nécessité pour la France de maintenir encore une brigade à Rome ? La capitale de l’église ne regorge-t-elle pas de volontaires catholiques venus de tous les coins du monde ? Faut-il sanctionner par notre présence la formation