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gouvernement du roi se renferme dans les limites de ma dépêche du 15 septembre, complétée par ma dépêche du 30 octobre, il ne sera pas désavoué par le gouvernement impérial. » Et que disaient ces dépêches du 15 septembre et du 30 octobre ? Elles étaient justement la réserve aussi ferme qu’habile du droit national, des aspirations nationales de l’Italie. Ce n’était donc pas une solution, c’était une situation de fait créée provisoirement dans une pensée de paix. Après tout, à quoi s’engageaient simplement les Italiens ? A ne pas employer la force, et dans ces termes cette situation n’avait assurément rien de défavorable.

Elle n’était pas sans doute encore le dernier mot des espérances italiennes, dont elle semblait même ajourner la réalisation en plaçant Rome et le petit patrimoine de saint Pierre sous la sauvegarde d’une combinaison internationale. En réalité cependant, si la convention du 15 septembre avait un désavantage, ce n’était ni pour la France ni pour l’Italie ; c’était bien plutôt pour le saint-siège, qu’elle laissait en tête-à-tête avec lui-même, aux prises avec tous les embarras d’un gouvernement diminué, affaibli, privé de ressources. Que pouvait-il faire, ce pouvoir temporel ainsi réduit et soumis à une telle expérience ? S’il ne mourait pas subitement, il n’était pas bien sûr de vivre. Il était destiné à s’affaisser lentement. Le temps était contre lui, la force des choses était pour l’Italie, et si l’Italie avait déjà pour elle cette force des choses au moment où elle signait la convention du 15 septembre, elle l’avait bien plus encore lorsque l’annexion de Venise a eu définitivement complété l’unité italienne, lorsque la première occupation française a eu cessé à Rome. Dès lors ce n’était plus qu’une affaire de patience et d’habileté. Rien n’était plus simple que la politique à suivre pour les Italiens : ils n’avaient qu’à attendre, à se donner une administration qu’ils n’ont pas, à se créer des finances qu’ils ont encore moins, à développer toutes les forces du pays, à enfermer ce reste de pouvoir temporel dans le cercle magique d’une nation vivace, rajeunie, retrempée par la liberté, et en définitive à profiter des circonstances. Le résultat était infaillible. Je ne veux pas dire que cette politique n’ait été entrevue : elle l’a été au contraire par des esprits très fermes ; malheureusement elle n’a pu être pratiquée ni avec la fermeté ni avec la suite qui pouvaient la conduire à son victorieux dénoûment, et ce qu’on ne remarque pas, ce que je veux ajouter, c’est que les malheurs de cette convention de septembre, qui vient d’avoir une fin si tragique, ne sont pas seulement le résultat d’une question extérieure née subitement entre la France et l’Italie, ils tiennent à toute une situation intérieure, à une déviation véritable et assez récente de la politique italienne.