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invulnérables, et ils en concentrèrent la puissance dans un très petit nombre de canons du plus gros calibre. C’est de cet ordre d’idées que sont sortis les monitors, qui se sont trouvés parfaitement appropriés au rôle pour lequel ils avaient été construits. Tout le monde sait que ces navires, uniquement destinés à l’attaque et à la défense des côtes et non à la navigation de, la haute mer, ont un pont blindé excessivement ras sur l’eau, au-dessus duquel s’élève une tourelle, blindée aussi et quelquefois casematée, qui contient deux pièces du plus gros calibre. Ces deux canons sont établis parallèlement dans la tourelle, qui est percée de deux petits sabords oblongs ; une petite machine à vapeur donne à l’ensemble de la tour et des deux pièces un mouvement de rotation au moyen duquel les monitors peuvent lancer leurs projectiles dans toutes les directions, satisfaisant ainsi à la condition nouvelle imposée à l’artillerie de pouvoir couvrir tout l’horizon de ses feux.

Les États-Unis ont été si satisfaits des services que leurs monitors ont rendus dans la guerre d’Amérique qu’ils semblent aujourd’hui vouloir en faire le type de leurs navires de combat. Ils construisent de nouveaux monitors sur une grande échelle, et ils cherchent à les perfectionner afin d’en faire des bâtimens qui possèdent toutes les qualités nécessaires pour entreprendre de longues navigations et pour faire face aux exigences diverses des croisières maritimes. Le Miantonomoah et le Monadnoch, construits à peu près sur des plans identiques, sont les premiers navires qui ont été destinés à réaliser ce programme ; on sait l’étonnement et les appréciations contradictoires que l’apparition de ces vaisseaux a suscités chez les différens peuples maritimes de l’Europe. Le pont de ces monitors, construit avec une solidité exceptionnelle, n’est élevé que de 0m,60 centimètres environ au-dessus de la ligne de flottaison. Les ouvertures, aussi peu nombreuses que possible, qui y sont réservées pour la circulation des hommes, sont entourées d’hiloires assez hautes, et peuvent se condamner à volonté au moyen de panneaux mobiles d’une grande épaisseur ; deux tourelles tournantes s’élèvent à une hauteur de 3 mètres environ au-dessus du pont et sont réunies par une large passerelle. En dehors des circonstances où il fait calme plat, lorsque le Miantonomoah est à la mer, son pont, sans cesse sous l’eau devient inhabitable, et les panneaux sont sévèrement condamnés ; les hommes de quart se tiennent sur la passerelle qui réunit les deux tours, et dès que la mer est un peu forte ils voient les lames venir déferler sous leurs pieds et se briser contre la tour de l’avant. Quelquefois, même quand la mer est très grosse, la passerelle peut être atteinte par la crête des lames. Tout étant hermétiquement fermé, dès que le Miantonomoah prend la mer, un