l’expression de Pacca, une espèce d’homme-lige, le gouverneur d’une sorte de colonie française relevant de l’empire ; mais la juridiction spirituelle du chef de l’église était singulièrement limitée, son pouvoir de souverain pontife et la mise en pratique de ses devoirs comme arbitre suprême de la doctrine catholique étaient soumis au bon plaisir de la puissance temporelle. Quelle étrange idée de vouloir mettre Pie VII en contradiction avec tous ses prédécesseurs en lui faisant expressément et dogmatiquement approuver les maximes de l’église gallicane ! Quelle conception bizarre de vouloir faire signer à un pape et surtout à Pie VII l’engagement de ne pas troubler les consciences par ses actes et par ses paroles, comme si pareille supposition n’était point par elle-même la plus grossière des injures adressées à un pontife ! Et quelle ignorance des traditions séculaires et des habitudes les plus invétérées de l’église romaine que de prétendre lui donner des lois dans l’exercice des réserves pontificales, et de l’obliger en quelque sorte à soumettre ses rescrits, ses jugemens de doctrine et ses actes-de juridiction à l’approbation du souverain de la France ! Quoique au fond parfaitement décidé, Pie VII voulut réunir par-devant lui les membres du sacré-collège, ainsi qu’il les avait déjà convoqués aux débuts de cette affaire. Cette fois encore il voulut avoir leur avis dans une circonstance solennelle où se trouvaient simultanément engagés les intérêts de la religion catholique et ceux de la souveraineté temporelle des papes. En recevant communication des projets de traité, les cardinaux frémirent d’indignation, écrit le cardinal Pacca, et rejetèrent avec horreur les demandes de l’empereur[1]. Ce fut le 2 décembre que le saint-père, par une lettre tout entière écrite de sa main, fit part de sa résolution au cardinal de Bayanne.
« Monsieur le cardinal, nous avons appris, à notre grand chagrin, par votre lettre du 10 du mois passé, avec laquelle vous nous avez transmis l’ébauche de votre projet de traité, qu’aux demandes contenues dans la note de l’ambassadeur de France on en a ajouté plusieurs autres auxquelles nous ne nous attendions pas, tandis que ce projet n’exprime aucune des deux conditions auxquelles seules, ainsi que notre secrétaire d’état vous l’a mandé, nous avions consenti à la prolongation de vos pouvoirs, qui avaient été annulés par la lettre de notre main du 9. En effet, rien n’a été fait pour la révocation des mesures prises à l’égard de nos quatre provinces, et l’on se refuse à admettre le contenu des dépêches qui vous ont été adressées les 12 et 14 octobre.
« En conséquence, et comme le projet de traité ne se borne pas à exiger la fermeture des ports, mais qu’on persiste dans le dessein de nous faire entrer dans une fédération qui nous obligerait à reconnaître pour
- ↑ Mémoires du cardinal Pacca, t. 1er, P. 52.