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une négociation qui doit avoir lieu à Paris, et dont l’objet serait d’arranger tous les différends qui existent entre sa majesté et le saint-siège. Nous nous prêtons volontiers à une chose que nous avons toujours désirée[1]… »

Cependant l’empereur était arrivé à Paris, et peu de jours après il avait fait donner ordre à M. Alquier de presser le saint-père d’envoyer un négociateur à Paris. Le saint-père désigna à cet effet le cardinal Litta. M. Alquier parut d’abord satisfait de ce choix ; mais quelques jours après il déclara au cardinal Casoni que l’empereur n’en voulait pas. En même temps arrivaient de Paris des dépêches du cardinal Caprara. Le cardinal-légat informait sa cour de ce qui s’était passé dans une audience que Napoléon venait de lui accorder. L’empereur s’y était plaint de la façon la plus amère de la conduite du pape et de la résistance qu’il opposait à ses volontés suprêmes. Il voyait bien que le cœur de Pie VII lui était entièrement aliéné. C’étaient les ennemis les plus dangereux de sa sainteté qui en étaient cause. Napoléon avait accompagné toutes ces doléances de menaces, et terminé en disant que, si la négociation n’avait pas l’issue qu’il en attendait, il s’emparerait des provinces de l’Adriatique. Caprara faisait également savoir que l’empereur récusait tous les cardinaux, excepté le cardinal de Bayanne, et qu’il exigeait que la négociation pour le concordat germanique eût lieu à Paris, sous les yeux du chef de la confédération. Enfin le légat envoyait copie d’une note qu’il venait de recevoir de M. de Champagny, successeur de M. de Talleyrand au ministère des relations extérieures.

Le remplacement de M. de Talleyrand devait avoir de fâcheuses conséquences pour la conduite des affaires pendantes avec la cour de Rome. Il avait été amené par une suite de circonstances singulières et qui étaient elles-mêmes un signe des temps. Jamais M. de Talleyrand n’avait paru plus en faveur auprès de l’empereur, jamais il ne lui avait rendu de plus utiles services que pendant la dernière campagne d’Allemagne, et surtout durant les négociations qui en furent la suite. A plus d’une reprise le Moniteur avait informé le public de la satisfaction que l’empereur éprouvait du zèle et des efforts de son ministre des relations extérieures. Personne ne fut donc étonné que M. de Talleyrand aspirât à monter alors au premier rang. Il n’était que simple ministre et devait en cette qualité, suivant la hiérarchie du régime impérial, céder le pas aux grands dignitaires. Cette infériorité lui déplaisait ajuste titre. Or il se trouvait que les fonctions de grand-électeur et celles d’archichancelier d’état n’étaient pas remplies en ce moment. Les titres

  1. Lettre de Pie VII adressée au vice-roi d’Italie, 11 août 1807.