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Il est digne d’attention que le gouvernement impérial dans sa plus haute expression, par la bouche de l’empereur lui-même, a fréquemment recommandé la suppression de ces entraves, l’abolition ou l’atténuation de ces règlemens ; mais le système réglementaire persiste dans le domaine de la pratique ; il gagne du terrain plutôt qu’il n’en perd. La capitale, qui, plus que le reste de l’empire, est sous les yeux de l’empereur, qui est le siège de son gouvernement, en offre un remarquable modèle et en reflète les inconvéniens multipliés. Chacun sait quelles persécutions on dirige en ce moment contre l’industrie parisienne au moyen de règlemens que je crois illégaux, et qui sont arbitrairement appliqués, avec le dessein évident de chasser de l’enceinte de Paris les ateliers importans. L’organisation municipale de Paris est d’ailleurs la négation du système représentatif, puisque l’énorme budget de cette ville est voté en recettes et en dépenses sans aucune intervention du contribuable. Le gouvernement impérial proteste de son goût pour le système représentatif ; il n’est pas moins explicite quand il s’agit de manifester en principe ses répugnances pour le système réglementaire et le despotisme administratif. Pour mon compte, je me déclare convaincu de la sincérité de ses protestations ; mais le siècle est si sceptique ! Il est à craindre que les déclarations du gouvernement ne rencontrent des incrédules parmi les gens les mieux intentionnés, tant que le despotisme administratif pèsera sur Paris et y exercera ses caprices, tant que le contrôle des contribuables sur les recettes et les dépenses n’aura pas été rétabli dans la capitale.

Je m’arrête dans ces observations. Elles donnent une idée de l’intérêt que le lecteur, trouverait dans les ouvrages de MM. Bagehot et Fischel, du profit qu’en pourraient faire nos publicistes et même notre gouvernement pour réformer et améliorer nos institutions. C’est le but que je m’étais proposé ici. Je me rendrais coupable cependant d’une omission regrettable, si je n’ajoutais qu’un troisième auteur, jeté par nos agitations politiques de l’autre côté du détroit, où il vit aujourd’hui de son plein gré, M. Esquiros, a utilisé son séjour prolongé en Angleterre pour écrire une suite de tableaux qui dépeignent au naturel l’Angleterre, ses mœurs, ses usages, ses institutions en tout genre, et sa politique comme le reste. Rien de plus instructif pour les continentaux. Ces tableaux, qui paraissent presque périodiquement dans la Revue, forment le complément obligé des ouvrages de MM. Fischel et Bagehot pour quiconque veut bien connaître ce qu’est cette nation anglaise ou plutôt cette race qui joue maintenant un si grand rôle dans toutes les parties du monde.


MICHEL CHEVALIER.