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de consistance des principes du maréchal, ou son habileté insuffisante, ou la dissolution des mœurs politiques de l’Espagne ? Quoi qu’il en soit, le maréchal O’Donnell avait toujours conservé une grande situation personnelle, qui au besoin aurait pu être encore une fois utile à son pays. L’union libérale, puisqu’elle avait échoué avec son chef, ne saurait lui survivre. Les tentatives diverses du général Prim ont eu une si triste fin que ce général ne peut plus être considéré comme le chef militaire sérieux du parti progressiste. Il semble que dans ces circonstances le cabinet actuel d’Espagne pourrait un peu élargir sa base. Ayant défendu l’ordre par des moyens redoutables, le cabinet Narvaez a réussi à le maintenir. Son ministre des finances, M. Barzanallana, a su profiter de l’amélioration politique pour parer par une marche lente, mais persévérante, aux difficultés financières. Il a réussi dans plusieurs opérations de trésorerie. Une souscription importante d’obligations domaniales, de pagarès, qui n’eussent pu se placer nulle part au commencement de cette année, vient d’être couverte par les capitaux espagnols. Les dettes différées et passives ont été amorties en grande partie à l’aide d’une combinaison qui a fait entrer des fonds dans le trésor espagnol. M. Barzanallana mettrait le comble en France à sa bonne renommée, s’il parvenait à faire quelque chose pour les chemins de fer espagnols, dont les titres avaient été souscrits avec tant de confiance par les capitalistes français, et qui sont en ce moment des valeurs sans revenu. Il ne se peut que la situation de ces chemins de fer soit considérée par le gouvernement comme un intérêt d’un ordre médiocre dans les affaires d’Espagne. Le ministère a également un intérêt national à presser le développement du réseau. Les deux intérêts se rencontrent donc, car les capitaux ne se présenteront point pour la construction des nouvelles lignes tant que l’Espagne se refusera à sauver de la ruine les capitaux engagés dans les anciennes. Devenu plus libre, plus indépendant, plus maître de sa conduite par le succès de son dernier emprunt, le gouvernement espagnol peut maintenant étudier avec plus de soin la situation des chemins de fer et travailler à des combinaisons qui feraient honneur à son esprit de justice, tout en étant utiles aux intérêts de l’Espagne.

Des scènes fâcheuses se sont passées récemment en Angleterre : il y a eu les terribles révélations de l’enquête sur les coalitions d’ouvriers ; il y a eu ces attaques sanglantes des fenians, qui, après un procès plein d’émotion, ont appelé sur les coupables des condamnations à la peine capitale ; le haut prix du pain provoque dans les districts habités par des populations malheureuses ces rassemblemens tumultueux qu’excite toujours la cherté des alimens indispensables à la vie. Une chose remarquable cependant, c’est que, tout en portant une attention vigilante, soit à des répressions nécessaires, soit aux soulagemens réclamés par des misères douloureuses, les hommes d’état anglais montrent toujours dans leurs manifestations publiques la même sérénité libérale. On dirait que