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représentation de cette province un caractère plus spécialement municipal, cette classe dut à peu près s’effacer en Bretagne à cause de sa faiblesse numérique au sein d’une assemblée envahie par le flot toujours croissant des gentilshommes, demeurés les dominateurs incontestés des états.

La représentation de la noblesse avait souvent varié avant d’aboutir à une sorte de suffrage universel attribué à tous les notables. Sous les ducs, on avait réuni aux neuf grands barons de la province[1] les anciens chevaliers bannerets qui relevaient directement des comtes avant que les divers comtés se fussent fondus dans l’unité ducale. À cette première catégorie de l’aristocratie féodale étaient venus s’adjoindre les gentilshommes investis de fonctions importantes soit à la cour, soit dans le gouvernement des ducs, ceux-ci recevant directement du prince une invitation personnelle afin de siéger aux états. Après la réunion à la monarchie, les gouverneurs, se considérant comme substitués aux anciens ducs en leur qualité de représentans du souverain, continuèrent d’adresser au nom du roi des lettres spéciales de convocation à un certain nombre de gentilshommes. Ce nombre était assez restreint, comme on peut s’en assurer en dépouillant les listes de présence aux registres des états de 1567 à 1584 ; il va même diminuant d’une tenue à l’autre, ce qui semble témoigner sous les derniers Valois d’une sorte d’indifférence pour l’exercice de droits politiques singulièrement réduits en effet depuis la réunion, puisque toutes les questions diplomatiques et militaires échappaient forcément à l’appréciation de ces assemblées ; mais la situation changea complètement durant les guerres de la ligue. Deux centres de gouvernement s’étant établis en Bretagne, chacun attacha du prix à se couvrir du grand nom des états. Le prince de Dombes convoqua ceux-ci à Rennes depuis 1589 jusqu’en 1597, tandis que durant la même période Mercœur les réunissait à Nantes. On se montra d’ailleurs fort peu difficile de part et d’autre sur la régularité des convocations et sur les titres de ceux qui se présentaient pour faire partie de l’une ou de l’autre assemblée, l’essentiel pour les deux chefs de parti étant que ces assemblées fussent nombreuses afin de frapper l’opinion. Le prince de Dombes désigna pour représenter les villes engagées dans l’union catholique quelques magistrats royalistes réfugiés à Rennes. Quant à l’ordre du clergé, il ne brilla guère que par son absence jusqu’à l’abjuration du roi. Le prince de Dombes, qui représentait Henri IV, ouvrit d’ailleurs à deux battans les portes de la chambre de la noblesse à tous les gentilshommes disposés à y entrer, et

  1. Les neuf grandes baronnies dont la possession conférait la présidence de la noblesse aux états étaient Léon, Vitré, Ancenis, Fougères, Chateaubriant, La Roche-Bernard, Quintin, Retz et Pont-Château.