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les précieux cailloux. Cette carrière, déjà exploitée par l’antique Égypte, ainsi que le prouvent les hiéroglyphes tracés sur le rocher, a été découverte par un joaillier français, M. Petiteau. Le premier, il a sérieusement étudié ces belles pierres bleues, et il est le seul parmi les exposans qui offre au public ce qu’on peut appeler l’histoire de la turquoise depuis le moment où elle se forme dans la gangue originelle jusqu’aux dernières transformations qui en font une pierre d’ornement si remarquable. La turquoise se présente très rarement avec des formes rectilignes. La dureté varie comme la coloration, et croît en même temps qu’elle. Il y a des turquoises blanchâtres qui sont spongieuses et friables ; il y en a au contraire de colorées en bleu intense et voisin du bleu cobalt, celles-là sont presque cristallisées et très dures. La turquoise d’un bleu vif et parfaitement homogène est rare, par conséquent d’un grand prix. Cette nuance, due aux sels de cuivre qu’elle contient, ne se trouve dans aucune pierre précieuse transparente. Elle se taille en cabochon et se polit aisément. Toutefois, en raison des élémens chimiques dont elle se compose, il faut lui faire subir l’épreuve de l’air, de la lumière et de l’eau avant de la livrer au commerce.

La ruelle de la Chine et du Japon nous montre d’abord dans ses vitrines quelques livres chinois des éditions impériales, vrais chefs-d’œuvre de typographie. Les belles gravures sur bois représentant les vases antiques du musée de l’empereur Khian-Loung, publiées en 1750, donnent les plus précieux renseignemens sur la beauté des formes et la grande tournure de ces vases, qui remontent parfois à dix-huit cents et deux mille ans avant Jésus-Christ, alors que des Grecs il n’était pas encore question. Ce qui manque à l’exposition des produits de la Chine, ce sont les porcelaines, l’empereur du Céleste-Empire n’ayant pas trouvé convenable d’envoyer les siennes chez « les barbares à cheveux rouges. » Le grand art de l’époque des Sung et des Ming n’est donc pas représenté. A part quelques vases sang caractère, quelques grès de Satzouma, quelques porcelaines de Yeddo, la capitale du Japon, et de Miacho, ville du même pays où se fabrique la porcelaine blanche et bleue, il ne se trouve rien de véritablement remarquable, rien de ce que nous offrent les collections de quelques-uns de nos amateurs. Les Chinois oublient trop la « grande étude, » comme Confucius intitule la philosophie, « autrement dit l’art de se renouveler, — seule manière pour l’esprit humain de marcher en avant sans dépérir. »

Ce qui n’a pas dépéri ni déchu, c’est la vieille industrie des laques du Japon. Les taïciuns rivalisent entre eux de merveilles ; coffres, tables, cabinets, étagères, vases et plateaux, sont là comme des échantillons de ce que savent faire ces admirables ouvriers