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Il caractérisait la terre comme étant la planète du juste milieu. La plasticité du globe terrestre offre, disait-il, plus d’harmonie que celle des autres planètes ; les aspérités qui en hérissent la surface sont moins accentuées que celles qui existent sur Vénus et sur la lune. N’étant ni trop voisine ni trop éloignée du soleil, la terre n’est exposée qu’à une chaleur modérée ; elle n’a qu’un seul satellite, pendant que d’autres planètes en ont jusqu’à huit ou n’en ont pas du tout. Elle représente en toutes choses une sorte de terme moyen également éloigné de tous les extrêmes, et cet équilibre admirable des conditions d’existence de la terre semble indiquer un développement individuel qui s’est harmonisé d’une manière définitive avec le système solaire tout entier, et qui fait de la terre le séjour prédestiné de l’homme. A ce point de vue, les harmonies et les contrastes qui se manifestent dans la configuration du relief terrestre et dans la distribution des continens doivent nous paraître doublement intéressans, puisque les moindres détails se montreront plus ou moins importans pour le développement de notre espèce.

M. Reclus esquisse d’une manière rapide l’histoire des premiers âges de la terre et énumère les diverses objections qui ont été élevées contre l’hypothèse de Kant et de Laplace, d’après laquelle les planètes seraient les débris condensés d’une ancienne nébuleuse. La première de ces objections est tirée de la présence des comètes, qui, dans l’hypothèse en question, sont étrangères au système solaire. Cette prétendue objection nous semblerait plutôt une confirmation, car les recherches de M. Hoek et de M. Schiaparelli portent à croire qu’en effet toutes les comètes sont des nébuleuses errantes qui nous viennent des profondeurs de l’espace. Les autres difficultés signalées par M. Reclus ne nous paraissent pas beaucoup plus graves que celle-là ; elles sont peut-être contre-balancées par les probabilités que l’ingénieuse théorie de M. Faye sur la formation des soleils apporte en faveur de l’hypothèse si bien développée par Laplace. M. Reclus nous semble être beaucoup plus dans le vrai lorsqu’il s’efforce de combattre l’opinion, encore très accréditée, d’après laquelle l’écorce solide du globe ne serait qu’une mince pellicule recouvrant un noyau entièrement liquide. Les calculs de W. Hopkins et de sir W. Thomson, qui se fondent sur la considération de certains phénomènes astronomiques, assignent à la partie solide du globe une épaisseur incomparablement plus grande que les 50 kilomètres que l’on trouve dans tous les ouvrages populaires. Ce nombre a été déduit de l’accroissement de la température qui s’observe à mesure que l’on pénètre dans les couches superficielles du sol, et qui est en moyenne d’un degré centigrade par 30 mètres de profondeur. On suppose que cet accroissement se continue d’une manière régulière, et l’on arrive ainsi à 1,600 degrés pour une profondeur de 50 kilomètres ; mais ce calcul repose sur l’hypothèse, entièrement gratuite, que les couches profondes