jour entamant des pourparlers avec les leaders de la majorité à Pesth sans savoir quelle suite il donnerait à ses premières démarches et s’il conseillerait l’acceptation de la constitution hongroise de 1848. Après avoir assoupi l’esprit public, il accepta la guerre avec la Prusse et la lutte sur le terrain allemand comme une dérivation à ses soucis de politique intérieure, persuadé qu’une victoire sur les Prussiens rendrait au gouvernement la force et le prestige qu’il avait presque totalement perdus depuis l’échec de Solferino. Incertain de ce qu’il ferait à l’égard de la Vénétie, il a mieux aimé risquer les chances de battre les Italiens que de se donner vis-à-vis de l’Europe, qui le conviait à prendre part à un congrès, le bénéfice moral d’une situation nette et d’un respect sérieux pour la volonté de populations impossibles à conserver à la domination autrichienne. Au travers des incidens graves qui ont précédé la guerre, les trois comtes, ainsi nommait-on MM. de Mensdorff, Esterhazy et Belcredi, n’ont pas prononcé une parole qui pût enflammer l’Allemagne, si peu façonnée encore aux allures despotiques de M. de Bismark. Ils ont pensé qu’ils sauveraient l’empire en négociant habilement certains arrangement secrets dont l’histoire n’a pas encore le dernier mot. À ce jeu, l’Autriche a dépensé 600 millions de francs, et elle a cessé de faire partie de la confédération germanique, accablée de lassitude au bout d’un mois de campagne, hors d’état de se relever militairement de sa défaite par un effort vigoureux contre les envahisseurs. Quelle autre situation n’eût-elle pas eue, si la Hongrie, sincèrement rattachée, avait envoyé sur le théâtre des hostilités ses bandes héroïques de volontaires, si l’Allemagne avait pu entendre une voix venant du Danube lui formuler avec l’esprit libéral de notre époque un programme de reconstitution ! Tout cela a manqué, et à l’arrivée de M. de Beust aux affaires bien des gens croyaient l’Autriche à la veille d’une catastrophe décisive.
L’empereur François-Joseph, élevé à l’école de l’adversité, ne s’est pas mépris sur l’étendue du péril. Il s’est dit que le temps était fait des doctrines d’absolutisme et de centralisation qui lui avaient été prêchées par tout son entourage, et il se choisit un ministre en dehors de la coterie du palais. M. de Beust, nature énergique et laborieuse, avait trop longtemps étouffé dans un cadre trop étroit pour son activité ; il montra alors la mesure de sa valeur comme homme d’état. Appelé au portefeuille des affaires étrangères après la paix de Prague, il se donna trois mois pour étudier la situation, et au bout de ce temps il avait fait partager ses vues à son souverain, qui n’a cessé depuis lors de le soutenir contre toutes les influences hostiles. M. de Beust n’eut pas d’autre politique que de courir au plus pressé. « Nous n’avons pas le choix