Page:Revue des Deux Mondes - 1867 - tome 71.djvu/54

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

échangées contre d’autres parties de valeur égale, de manière à lui assurer désormais un bien d’un seul tenant, et ceux qu’il a fallu exproprier reçoivent une compensation équivalente. On taille des propriétés sans enclaves, qu’on attribue à chaque propriétaire en raison de ce qu’il possédait auparavant. De cette façon, on obvie aux inconvéniens du morcellement exagéré, et quand l’opération se fait équitablement avec le concours des autorités locales, tout le monde y gagne, la culture surtout. Il est plus d’une région en France où l’application de cette variété de l’expropriation pour cause d’utilité publique serait très profitable aux cultivateurs. Ce n’est en réalité qu’un échange obligatoire qui a pour résultat certain d’augmenter la valeur de toutes les propriétés qui y sont soumises. Si les hommes étaient assez raisonnables pour discerner leur propre intérêt, ils feraient l’opération spontanément, sans l’intervention de la loi. Ce qui rend celle-ci nécessaire, c’est que la mauvaise volonté et les prétentions exagérées d’un seul suffisent pour rendre le travail d’agglomération impossible.

Les instrumens aratoires perfectionnés et les machines commencent à se répandre. La charrue généralement employée dans la Prusse orientale était un araire d’une forme très primitive (Zoche), mais qu’on dit être facile à tirer. La charrue du Brabant et la charrue américaine, avec leurs socs bien aiguisés et leurs grands versoirs, qui retournent les sillons en volutes régulières, deviennent chaque jour moins rares ; cependant elles le sont encore beaucoup trop. Sur le domaine princier de Pless, une charrue à vapeur marche depuis 1863. C’est une admirable machine qui fait un bon travail ; mais elle a l’inconvénient de coûter fort cher et de ne fonctionner que pendant quelques jours de l’année. Les machines qu’emploie l’industrie coûtent encore davantage, mais elles rendent au moins des services continus, et gagnent d’une façon permanente l’intérêt du capital engagé. Les machines à battre avec manège sont très nombreuses ; celles à vapeur sont plus rares, on en compte de quinze à vingt par province. La province de Saxe seule en a soixante-dix. Le semoir à cheval est d’un usage assez général, surtout pour les betteraves. L’emploi des locomobiles agricoles s’étend. Dans différentes localités, entre autres à Bittburg et à Schweich, des cultivateurs se sont associés pour acheter une batteuse locomobile qu’ils emploient d’abord pour battre leur propre récolte et qu’ils louent ensuite aux autres fermiers, spéculation excellente qui offre un placement sûr aux petites épargnes villageoises, et qui, généralisée, rendrait de grands services aux campagnes. Il serait à désirer que dans chaque commune il se formât des sociétés par actions de ce genre. La machine serait mise à la portée de tous, même du petit cultivateur. Les paysan pourraient