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président d’une association réformiste. Malgré la mauvaise humeur des whigs, il est évident que le parti populaire, et avancé attache un grand prix au bill de réforme qui vient d’être voté. Les vsates, associations formées part le radicalisme et les classes ouvrières croient avoir remporté une victoire positive, et leurs chefs trouvent habile et opportun de célébrer ce succès par des manifestations publiques. Une de ces associations se propose de donner en l’honneur de la réforme obtenue un banquet public à Sydenham, au palais de cristal. Le président a envoyé à lord Russell et à M. Gladstone des invitations auxquelles ces hommes d’état ont répondu. Les invitations sont déclinées, mais les lettres sont curieuses. La plus amusante est celle de lord Russell. Elle est bien d’un vieillard acariâtre qui entend dire son mot jusqu’à la fin. Le vieux chef whig traditionnel paraît surpris qu’on fasse fête au nom du peuple à un bill de réforme qui n’est point son œuvre. Il prétexte dédaigneusement qu’il ne sait pas quelle est la valeur de cette soi-disant réforme, et il ne cache point qu’il n’en tire aucun bon augure ; mais il ne laisse pas échapper l’occasion de tracer un nouveau programme de parti. La réforme, suivant lui, ne pourra être jugée utile que si elle est suivie de mesures qu’il énumère. Parmi ces mesures, il place en première ligne des réformes religieuses et sociales en Irlande, l’abolition de l’établissement temporel de l’église anglicane d’Irlande et le changement de la loi qui régit les rapports des propriétaires avec leurs tenanciers. Comme l’Angleterre ne procède que par réformes successives et progressives, on y voit longtemps d’avance les abus qu’il faudra faire disparaître quand leur tour sera venu. Que cela soit le cas pour les affaires irlandaises, dont par le lord Russell, nous ne le contesterons point ; mais nous ne croyons pas que la solution de ces réformes soit interdite à aucun des deux partis qui se disputant le pouvoir, et que les whigs aient à cet égard un brevet de priorité. La réponse de M. Gladstone restait dans les généralités et ne portait aucune trace de défiance à l’égard du bill de réforme ; le grand orateur ne donnait aucun signe de l’humeur querelleuse dont lord Russell était animé. En lisant ces deux lettres, les esprits impartiaux ont manifesté des doutes sur la direction qui serait imprimée l’an prochain au parti libéral. Ce parti n’est plus discipliné et guidé par une influence unique et incontestée. À y bien regarder, c’était une coalition de partis plutôt qu’un parti homogène ; il avait des élémens très aristocratiques et très conservateurs et des élémens radicaux. Il est naturel que ces sections diverses, n’étant contenues ni par la grandeur d’un intérêt ou d’un principe dont il y aurait à poursuivre le triomphe prochain, ni par l’influence personnelle d’un chef incontesté, tendent à se disjoindre. Le parti libéral a donné depuis deux ans deux preuves d’indocilité à ses chefs : la première a été l’opposition des adulamites au bill de M. Gladstone ; la seconde a été la scission du tea-room (une section