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demeurant il n’a fait autre chose que donner une représentation vaine, parce que c’est le châtiment des pouvoirs qui prétendent vivre sans la liberté de créer des situations sans vérité et sans sécurité.


III

Le dernier mot de ce système, c’est évidemment l’absolutisme, un absolutisme plus ou moins déguisé. Le ministère espagnol, je le sais bien, désavoue cette pensée comme inspiration permanente. Il en est toujours à cette idée de six mois ou un an de dictature nécessaire pour réorganiser et discipliner l’Espagne avant de lui rendre la liberté et la constitution, et il est très vrai qu’il a rendu au moins un apparent hommage à cette constitution en faisant des élections, en réunissant des chambres nouvelles ; il est très vrai, qu’il ne va pas jusqu’au bout, que d’autres à ses côtés vont plus loin que lui, et que par une fortune singulière il est traité quelquefois comme il traite lui-même l’union libérale, comme un pouvoir qui n’a pas rompu entièrement avec la révolution. En réalité cependant cette pensée d’absolutisme se déploie ostensiblement dans tout ce que fait le ministère espagnol, dans sa manière d’interpréter théoriquement ce qui reste du régime représentatif, et surtout de le pratiquer. Je ne veux prendre que deux faits qui sont le complément du système.

La constitution de 1845 existe, on le dit elle n’a pas été du moins supprimée, et c’est encore le mérite du ministère Narvaez d’avoir reculé jusqu’ici devant la pensée de la réformer par un acte sommaire de dictature. Malheureusement, dans le rapport qui précède le décret de dissolution des cortès du 30 décembre 1866 et qui est l’œuvre de M. Gonzalez Bravo, il y a quelques phrases savamment obscures ou trop claires qui ne promettent pas peut-être des jours sereins à cette malheureuse constitution, sur laquelle, sans parler des révolutions, toutes les menaces de réforme sont suspendues depuis quinze ans. « L’expérience d’essais répétés pendant trente-trois ans de cruelles vicissitudes et de révoltes stériles, dit M. Gonzalez Bravo, nous découvre au milieu des catastrophes les plus étranges et les plus imprévues un fait primordial qu’il n’est donné à personne de méconnaître. — La constitution interne et réelle de cette antique nation n’est point du tout d’accord avec l’interprétation qu’ont donnée souvent aux lois politiques faites durant leurs diverses dominations les partis qui nous divisent et nous déchirent. Les conseillers responsables de votre majesté jugent que ceci est une des occasions les plus favorables pour établir l’indispensable relation, la nécessaire harmonie entre les élémens véritablement