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question de Bab-el-Mandeb. Son rapport n’est pas encore connu. Jusqu’à présent, on regarde comme difficilement surmontables les obstacles, que présente l’établissement d’un lazaret à l’entrée et en dehors de la Mer-Rouge. En supposant néanmoins qu’on arrive à obtenir la clôture sanitaire du Bab-el-Mandeb, tout ne sera pas dit. Il s’agit en effet de préserver le Hedjaz ; or ce pays peut recevoir le mal par l’une des caravanes de terre dont nous avons plus haut indiqué la marche. On peut admettre à priori l’innocuité de celle de Damas, qui traverse de longs déserts avant d’arriver sur le territoire sacré ; mais les convois qui passent par le Djebel-Shammar et par le Neijd apportent au Hedjaz des arrivages directs de Bagdad et de Bombay, deux localités des plus justement suspectes. A première vue, les difficultés nous paraissent encore plus grandes que du côté de Bab-el-Mandeb. On doit donc prévoir que le choléra pourra encore être importé à La Mecque par l’une des caravanes. Le Hedjaz envahi, on ne saurait trop le répéter, car c’est le nœud de la question, il menace l’Égypte, qui menace elle-même l’Europe. En vue de cette éventualité, la conférence n’a pas hésité à conseiller l’adoption à titre permanent de la mesure qui avait été ordonnée, comme nous l’avons vu, en 1866, à savoir l’interruption des communications maritimes entre la côte orientale d’Arabie et l’Égypte en cas d’épidémie dans le Hedjaz ; elle y ajoute l’idée de l’établissement de deux lazarets, l’un à El-Wesch pour les pèlerins, l’autre à Tor pour les autres arrivages.

Si toutes les mesures qui viennent d’être indiquées pouvaient être adoptées et mises en pratique avec le soin convenable, il y aurait beaucoup de chances pour que le choléra ne fût pas importé dans le Hedjaz, et, s’il y éclatait, pour que l’Égypte, c’est-à-dire l’Europe, ne fût pas atteinte. Ce ne sont là cependant que des probabilités, et malgré toutes les précautions le choléra peut se montrer sur le territoire égyptien. Or ce pays est encore une sorte de goulet où le flot envahissant doit se resserrer, et d’où il peut se répandre ensuite dans toute la Méditerranée. L’Égypte tomberait donc aussi sous l’application de ce principe des défilés qui est l’une des bases de la stratégie sanitaire. Pour le cas où l’épidémie éclaterait à Suez, au Caire, à Alexandrie, la conférence s’est contentée de poser la question que voici : « Dans le cas où une épidémie de choléra venant par la Mer-Rouge se manifesterait en Égypte, l’Europe et la Turquie étant d’ailleurs indemnes, ne conviendrait-il pas d’interrompre temporairement les communications maritimes de l’Égypte avec le bassin de la Méditerranée ? » La question de l’Égypte au point de vue de l’opportunité et celle de Bab-el-Mandeb au point de vue de la possibilité restent les deux problèmes dont il faudra