pourvue d’eau, mais par le désert sablonneux et aride qui s’étend un peu plus au nord. Des marches forcées, la rareté de l’eau et des autres objets nécessaires à la vie épuisèrent bientôt les malheureux pèlerins. Une nuit, pendant qu’accablés de fatigue et démoralisés ils reposaient, le fils de Mohanna et les hommes à son service s’échappèrent par des voies à eux seuls connues, abandonnant la caravane sans eau, sans provisions et sans guide au milieu des sables. Presque tous les Persans périrent, et Mohanna ne voulut pas reconnaître les quelques pèlerins qui réussirent à regagner Bereydah.
Pendant deux années, les Persans n’osèrent plus s’aventurer par le Nedjd ; mais comme cette route est plus courte que celle du Djebel-Shammar d’une huitaine de jours et que l’émir Fayssal fit beaucoup de promesses et d’excuses à Téhéran, le courant se rétablit bientôt. Voici à quelles conditions les Persans sont admis : chaque pèlerin donne 40 tomans[1] pour son passage par la capitale, et 40 autres pour un sauf-conduit dans le reste du pays. De son côté, l’émir s’engage à leur fournir un chef investi de pleins pouvoirs pour les conduire et les ramener. En tenant compte des exigences illégales, M. Palgrave estime que chaque Persan laisse environ 150 tomans dans le Nedjd pour son passage. Ces pèlerins se donnent rendez-vous à Bassora, à Mohamméra ou à Bender-Bouchir. Ils traversent le Golfe-Persique pour aborder au port d’Ojeyr, d’où ils gagnent Hofhoof dans l’El-Haça et Ryad, capitale du Nedjd. La caravane, en quittant Ryad, traverse les localités de Dorama et de Kowey, et suit une ligne droite parsemée de villages et de puits, parallèlement au Djebel-Toweyk, jusqu’à Moghasil et à La Mecque. Le retour a lieu de Médine par un autre chemin un peu plus au nord, qui traverse Meshka et Ashka, et, entrant dans la province appelée Kasim, aboutit à Bereydah, où M. Palgrave a vu la caravane de retour en 1863. Elle était composée d’environ deux cents personnes. C’étaient en partie des Persans proprement dits de Chiraz, d’Ispahan ou d’autres villes de l’Irak-Adjemi, en partie des habitans de Meched-Ali, de Kerbelah ou de Bagdad, tous de la secte des chiites, bien qu’appartenant à diverses races. Le principal personnage de cette caravane était une dame indienne de haut parage, Tai-Djehan, avec une suite nombreuse de gens de Lucknow et de Delhi. Le chef, l’émir-hadji, comme on dit, était un fonctionnaire persan de Chiraz. Il avait eu beaucoup à se plaindre du conducteur nedjdli, et se rendit, pour réclamer contre ses procédés, à Ryad, où on lui fit un accueil très froid. C’est à peine s’il réussit
- ↑ Le toman, monnaie de Perse, vaut environ 12 francs.