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cométaire avec l’orbite d’un essaim d’étoiles filantes, et l’on a réussi à caser encore une douzaine de comètes dans les essaims périodiques dont l’existence paraît démontrée. Si ces rapprochemens un peu hasardés pouvaient se justifier d’une manière aussi complète que ceux qui ont été établis par M. Schiaparelli, l’hypothèse de l’identité des comètes et des étoiles filantes deviendrait un fait acquis ; mais ce que l’on peut déjà entrevoir dès à présent, c’est que l’étude attentive des étoiles filantes prendra rang parmi les travaux des astronomes de profession. Jusqu’à ce jour, on n’en soupçonnait pas l’importance, ou bien on la cherchait dans une application illusoire à la météorologie pratique.

Pendant que M. Schiaparelli était occupé à démontrer l’existence d’une parenté étroite entre les comètes et les météores lumineux qui sillonnent le ciel à chaque instant, M. Le Verrier entreprit de chercher la grosse planète qui pouvait bien avoir contribué à fixer l’essaim de novembre dans les domaines du soleil. Selon lui, ce résultat serait dû à une forte perturbation que la planète Uranus aurait exercée vers l’an 126 de notre ère sur un nuage cosmique passant à sa portée. Cette conclusion a été combattue par M. Schiaparelli, qui trouve que l’essaim de novembre n’a pu être dévié de son chemin que par Saturne ou par Jupiter. Tout ceci se décidera quand des observations plus exactes sur les étoiles filantes permettront d’en déterminer la marche avec plus de certitude. On devra prendre alors en considération les remarquables travaux de M, Saigey sur les variations que le nombre des étoiles filantes subit d’heure en heure dans les différens mois de l’année, variations qui sans doute recevront une explication satisfaisante dans une théorie complète du phénomène. Si on songe à tous les faits que les observateurs ont signalés et dont il reste à rendre compte, il faut s’avouer que l’hypothèse hardie et ingénieuse de M. Schiaparelli n’a encore soulevé qu’un coin du voile qui couvre la cause de ces apparitions mystérieuses. Toutefois cette hypothèse promet d’être féconde en résultats importans, et l’on ne peut s’empêcher de remarquer combien elle ressemble à une révélation. Depuis un temps immémorial, on a vu des étoiles filantes sillonner le ciel chaque nuit, et l’on s’est effrayé quand par aventure une grande comète étalait à l’horizon sa pâle clarté. Le sol de la terre est jonché de débris de comètes et de poussières cosmiques qui constituent peut-être un véritable engrais minéral tombé du ciel, et nous nous inquiétons d’une rencontre possible avec un de ces astres bienfaisans !


R. RADAU/


L. BULOZ.