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fin du XVIIe siècle. Rien n’empêche donc d’admettre que tous les cinq ont quitté leur foyer à la même époque. M. Hœk n’a formé ses combinaisons qu’avec des comètes qui ont paru à moins de dix ans de distance ; mais l’exemple qui vient d’être cité prouve assez que cette période est trop restreinte, et tout porte à croire que le nombre des groupes de même origine deviendrait bien plus grand par des recherches plus étendues.

Que deviennent les comètes qui se détachent ainsi du système auquel elles appartenaient pour suivre des routes indépendantes ? Une opinion déjà ancienne, à laquelle plusieurs faits récemment constatés semblent donner un certain degré de probabilité, veut que la matière cométaire s’épuise peu à peu en se disséminant dans l’espace. Kepler, dans sa Physiologie des comètes, compare ces astres aux vers à soie qui épuisent leurs forces en filant des cocons ; ils finissent, dit-il, par se dissiper et s’éteindre en abandonnant le long de leur route ces émanations qui forment les chevelures et les queues. M. d’Arrest a fait remarquer dernièrement que l’affaiblissement successif de la comète d’Encke, qui avait déjà frappé Encke lui-même, semble indiquer une perte de substance que cet astre subissait d’une manière continus depuis le jour où il fut découvert. La comète de Gambart nous réservait un spectacle bien autrement inattendu. Vers la fin du mois de décembre 1845, on la vit un beau matin se dédoubler et donner naissance à une nouvelle petite comète, qui l’accompagnait encore à son retour en 1852. Depuis, on ne l’a pas revue. On l’attendait l’année dernière, toutes ses positions avaient été calculées d’avance avec un soin minutieux, mais les astronomes ont eu beau la chercher, ils n’ont rien découvert, et il reste peu d’espoir qu’on la retrouve jamais. Il est donc possible qu’elle n’existe plus. Il suffit d’ailleurs de regarder avec un peu d’attention les admirables dessins de la comète de Donati que M. Bond a publiés dans les annales de l’observatoire de Cambridge pour y découvrir les traces visibles d’un éparpillement incessant de la substance cométaire. Les couches de poussière cosmique que l’astre abandonne sur sa route s’étendent comme des voiles légers sur les régions qu’il vient de franchir. On rencontre des vestiges d’un phénomène analogue dans quelques dessins plus anciens.

Les débris des comètes remplissent donc les espaces interstellaires. Ne serait-ce pas là l’origine des étoiles filantes ? Cette idée était déjà vaguement formulée par Kepler, reprise ensuite et développée très ingénieusement par Chladni dans son célèbre ouvrage sur les météores ignés. Elle a reçu l’année dernière une éclatante confirmation par une découverte dont l’honneur revient à un astronome italien, M. Schiaparelli, directeur de l’observatoire de Milan. M. Schiaparelli s’était simplement proposé de déterminer les orbites des météores qui nous arrivent par essaims vers les mois d’août et de novembre. Le hasard, qui vient si souvent en aide aux travailleurs, lui fit trouver plus qu’il ne cherchait.