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inconnu. De temps à autre, une comète isolée ou bien un groupe de comètes se détache de la bande et va faire une visite dans le domaine d’un soleil voisin, visite passagère, à moins que les visiteurs ne se trouvent pris et contraints de marcher désormais dans un orbe fermé autour de l’astre qui s’en est emparé. Les comètes nous arrivent donc en général de quelque étoile fixe. Le soleil modifie leur route, qui a déjà subi l’influence perturbatrice des autres étoiles dont elle a traversé la sphère d’action. Quelquefois plusieurs comètes nous viennent du même point de l’espace, ce sont des groupes qui ont entrepris un voyage en commun.

M. Hœk démontre que parmi les comètes connues on peut reconnaître l’existence de ces sortes d’associations. Si deux comètes sont venues ensemble du même point de l’univers, elles ont fait leur apparition dans la même région de la sphère céleste, et, en remontant dans le passé, nous les trouverons à la même distance du soleil. C’est ce qui a lieu en effet pour un certain nombre de couples signalés par l’astronome hollandais. M. Hœk a même réussi à former quelques groupes de trois et un de cinq comètes dont la parenté ne paraît pas douteuse. Ainsi la troisième comète de 1860 constitue avec la première et la sixième de 1863 une triade des plus remarquables. Elles ont paru dans le même point du ciel ; leurs trois routes se rapprochent si étroitement qu’elles semblent se réunir en faisceau. M. Hœk a cherché quelle était la distance qui séparait ces astres du soleil à des époques reculées. En 1648, ils ont été tous les trois à 200 rayons de l’orbite terrestre, ou à 3 milliards de myriamètres ; en 1260 à 6 milliards, et en 757 à 9 milliards de myriamètres. Il en résulte qu’ils ont navigué de conserve pendant plus de mille ans.

Les trois comètes de 1672, de 1677 et de 1683 ont également paru dans une même région du ciel et à peu d’intervalle (cinq et six ans). On aurait pu croire qu’elles constituaient un autre groupe de comètes associées ; mais les points d’intersection de leurs orbites n’offrent pas le rapprochement qui se remarque dans le cas précédent. La comète de 1672 est donc étrangère aux deux comètes de 1677 et de 1683, seulement voici ce qui est tout à fait inattendu et vraiment curieux : les deux dernières font partie du groupe dont trois membres nous ont visité en 1860 et en 1863. Leurs orbites ont le même point de rencontre que les trois autres, et l’on peut démontrer que les deux astres chevelus sont restés ensemble pendant au moins mille ans, précédant toujours les trois comètes de 1860 et de 1863 d’environ un milliard de myriamètres. Il faut en conclure que les cinq astres sont des émissaires d’un même foyer cométaire, et ce foyer paraît situé dans la constellation de l’Hydre mâle, non loin de la Grande-Nue. L’étoile qui nous a envoyé ces messagers est d’ailleurs, selon toute probabilité, tellement loin de nous, qu’une inégalité minime des vitesses originelles pouvait avancer de deux siècles l’arrivée des deux astres qui ont abordé dans les parages solaires vers la