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CHRONIQUE DE LA QUINZAINE.




31 août 1867.

Nous avons en quinze jours assisté à deux spectacles intéressans, l’entrevue de Salzbourg et le voyage de l’empereur dans le nord de la France. On sait quel est l’état moral du public français vis-à-vis des nouveaux problèmes politiques postés en Europe depuis un an ; c’est une ignorance inquiète, une fatigue des esprits tendus à la divination de déplaisantes, énigmes, une inertie défiante qui impose un ralentissement fâcheux aux affaires de commerce et d’industrie. Que veut l’empereur ? que fait-il ? que prépare-t-il ? voilà l’interrogation qui remplit le for intérieur du suffrage universel. La curiosité sur ce point n’est pas moins aiguë au dehors : les étrangers, eux aussi, tournent vers l’empereur des regards anxieux ; ils apprennent par une expérience positive que, lorsque la politique extérieure de la France n’est point le résultat et l’expression de délibérations nationales pratiquées au grand jour, lorsque cette politique est l’œuvre mystérieuse d’une autorité personnelle qui reste maîtresse absolue de ses conceptions et de ses résolutions, toute l’Europe éprouve le contre-coup de l’institution qui régit la France. Pressentir les desseins et l’action future de la politique française, c’est le grand intérêt du moment parmi nous et en Europe. Deux circonstances semblaient devoir répandre des lumières sur ce point obscur, c’était la grande démarche de Salzbourg et le voyage de Flandre fournissant à l’empereur l’occasion de quelque déclaration publique retentissante.

La rencontre des souverains a été antérieure au voyage dans les départemens du nord. Cependant les résultats de Salzbourg demeurent encore enveloppés de mystère, tandis, que l’impression produite par les harangues d’Arras, de Lille et d’Amiens est dans sa première fraîcheur et fournit une matière réelle aux réflexions du public. Un certain ton de mélancolie régnait dans les deux premiers discours : on y a vivement relevé les allusions aux revers passagers essuyés récemment par notre