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gère. La tâche financière de la session ne sera aussi qu’une réparation de fautes : s’il faut demander de justes indemnités pour les souscripteurs des emprunts mexicains, n’est-ce point parce que le gouvernement a commis la faute d’encourager par le patronage le plus notoire l’émission de ces emprunts, dont le produit est entre en partie dans les caisses du trésor ? Si, comme quelques esprits téméraires l’assurent, pour seconder la liquidation de la Compagnie immobilière et du Crédit mobilier, on a la pensée d’autoriser la Compagnie immobilière à contracter un emprunt de 100 millions qui serait garanti par la ville de Paris, ne sera-ce point la conséquence des fautes qu’on a commises par la création de la société de Crédit mobilier et par l’impulsion irréfléchie qu’on, a donnée aux travaux des grandes villes ? Ne sera-ce pas l’occasion d’éclairer la situation financière de la ville de Paris, dépensant avec le concours du Crédit foncier des centaines de millions qui n’ont été votés par aucune représentation de contribuables ? Au point de vue financier comme au point de vue politique, la prochaine session sera donc comme une vaste liquidation des fautes du passé. Pour mener à bien ces difficiles opérations, il faut que le gouvernement entre avec simplicité et franchise en compte avec le pays, il faut qu’il obtienne de l’opposition des miracles d’abnégation désintéressée ; son devoir et son intérêt sont donc de se présenter aux chambres et à la nation avec des façons conciliantes et une modération de bon goût.

La mort vient de frapper un homme distingué, M. Achille Fould, dont les derniers jours, nous en sommes convaincus, ont dû être attristés par les fâcheuses conséquences politiques des entraînemens financiers de notre époque. M. Achille Fould a appartenu à un groupe d’hommes du monde qui vers la fin du règne de Louis-Philippe s’appliquèrent à la politique avec une certaine ouverture d’esprit, une certaine vigueur de caractère et des idées modérées. C’étaient les jeunes de ce temps-là ; M. de Morny et M. de La Valette appartenaient aussi à cette compagnie d’élite où l’ambition politique s’unissait à la vie brillante. Ces jeunes hommes voltigeaient autour de M. Guizot, dont ils étaient les admirateurs dévoués, mais laissaient voir des dispositions d’indépendance et la volonté de fournir une carrière politique personnelle. La révolution de 1848, qui blessait leurs sympathies et avait l’air de contrarier leurs espérances, ne fit au contraire qu’abréger leur stage et leur offrir une plus » prompte occasion d’arriver aux premiers rôles. On connaît leur histoire ; elle a sa physionomie et a eu son importance dans les événemens contemporains, et nous n’avons point à la retracer ici. M. Fould aborda la carrière politique avec une aptitude professionnelle et spéciale ; il avait exprimé des vues financières intelligentes dans les dernières sessions de la monarchie de Louis-Philippe, et il devint bientôt sous la république et, dans le gouvernement du président ministre des finances. M. Fould s’at-