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MICHEL FARADAY


Il serait difficile de dire lequel on regrette le plus, dans Faraday, de l’homme ou du savant. Il a offert au monde l’un des spectacles les plus rares et en même temps l’un des plus consolans qu’il nous soit donné de contempler, celui de la grandeur sans ennemis. On le comptait parmi les gloires de l’Angleterre, son nom était populaire comme peu d’autres, avant lui ou à côté de lui, mais sa modestie, resta toujours telle, qu’il ne porta ombrage à personne, que l’envie elle-même ne trouva pas à mordre sur cette existence noble et pure. Faraday refusait les places les plus avantageuses pour rester fidèle à l’Institution royale, qu’il aimait et qui était sa tribune. Quand on lui offrit le titre de baronnet, si recherché en Angleterre[1], il répondit que ce titre, ne devant lui rien apprendre, ne pouvait lui être bon à rien. Cette réponse résume Faraday.

Un auteur anglais l’a mis en parallèle avec d’autres savans illustres de la même nation, pour montrer qu’il a été le seul qui fût sans tache. Davy, son maître, avait au même degré le génie des découvertes, mais sa hauteur et son insatiable ambition n’étaient pas faites pour lui concilier de profondes sympathies. Wollaston était au moins un aussi grand expérimentateur et peut-être un plus grand chimiste que Faraday ; mais autant ce dernier se montrait toujours ouvert et bienveillant, autant l’autre était froid et dissimulé, il n’était pas aimé de ses contemporains. Newton enfin, le grand Newton, n’a été rien moins qu’un beau caractère. Sans rien préjuger sur l’issue de la discussion que M. Chasles vient de soulever, on sait que dans ses rapports avec Leibniz, Hooke, Flamsteed et d’autres savans, Newton a fait preuve d’une loyauté assez

  1. Ce titre donne le droit de faire précéder le nom de baptême du mot sir. On dit sir John, sir David, jamais sir Herschel ou sir Brewster.