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imposantes têtes à perruque. Le président différait dans ce temps-là très peu des autres membres, et le présent speaker lui ressemble absolument par la manière de s’habiller. Il reçoit 6,000 livres sterling (150,000 fr.) de traitement annuel et est en outre magnifiquement logé dans le palais. Avec l’argent que lui alloue l’état, le speaker invite et réunit à tour de rôle dans ses salons les députés, qui sont d’ailleurs tenus de s’y présenter en habits de cour. Cette vieille étiquette nuit beaucoup au succès de telles réceptions : M. Bright, par exemple, et beaucoup d’autres répugnent invinciblement à cet uniforme obligé (l’épée, la culotte courte et le frac), qu’ils considèrent comme indigne d’hommes sérieux[1]. Autrefois le président portait un tricorne sur l’édifice de ses cheveux poudrés à blanc ; maintenant il ne se couvre jamais durant les séances, et il n’y a que les simples députés qui gardent leur chapeau sur la tête quand ils sont assis. En dépit de son nom, le speaker est après tout un des membres de la chambre qui parlent le moins. Si ce n’est dans le sein des comités, il doit s’abstenir de prendre part aux débats. Son titre de parleur lui vient donc, selon toute vraisemblance, de ce que dans certaines occasions il adresse au nom de la chambre un discours officiel à la reine. Il faut croire que nos voisins aimaient à considérer le speaker comme un être surnaturel, car jusqu’à ces derniers temps sa présence était absolument nécessaire pour revêtir d’un caractère légal tous les actes de l’assemblée. On n’avait même point prévu qu’il pût être malade. Il y a une dizaine d’années, quelques membres de la chambre avaient prêté serment en l’absence du speaker, qui était alors retenu chez lui par une grave indisposition : plus d’un doute s’éleva sur la validité de la chose jurée, et il fallut un vote tout spécial de la chambre pour rassurer à cet égard les consciences. Aujourd’hui le président du comité des voies et moyens (chairman of ways and means) peut dans certains cas remplacer le speaker.

Du temps où la formule du serment impliquait une profession de foi chrétienne, deux ou trois membres, parmi lesquels le baron Rothschild, prenaient part aux premiers travaux de l’assemblée, tels que l’élection du président, puis disparaissaient ensuite durant toute la durée de la session. La cérémonie du swearing-in (prestation de serment) a lieu de neuf heures du matin à quatre heures du soir ; plus tard, dans la journée, un tel acte serait considéré comme tout à fait nul. Après ces préliminaires, l’horloge de l’état, comme disent les Anglais, est montée ; mais pour la mettre en

  1. Les membres du parlement chargés de porter à la reine l’adresse en réponse au discours de la couronne ont déjà obtenu de se présenter devant elle en habits de ville. Seulement ils ne peuvent apporter avec eux ni canne ni parapluie.