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employés pour relever les eaux de ces deux rivières. Ce n’est pas que ces eaux soient précisément impropres aux usages publics auxquels on les réserve en entier ; ce n’est pas non plus que les engins, roues hydrauliques, pompes et machines à vapeur, doivent être traités avec dédain. Cependant tous ces organes mécaniques n’inspirent pas ce semble, la même confiance qu’un aqueduc où l’eau s’écoule par une pente naturelle. Tout cela est sujet à périr, est condamné à un renouvellement périodique, exige des soins d’entretien incessans, des dépenses de combustible, le concours d’un nombreux personnel. On n’y sent pas le caractère de pérennité qui donnait aux travaux hydrauliques des Romains un cachet d’indestructible grandeur. Rome jouit encore des aqueducs qu’ont établis ses anciens édiles ; en serait-il de même si ceux-ci s’étaient contentés d’aspirer les eaux du Tibre par des moteurs que les révolutions n’auraient pas épargnés ? Cette condition de permanence et de durée commandait l’examen attentif d’un projet qui fut présenté, il y a quelques années, en concurrence avec la dérivation des eaux de la Champagne, et qui consistait à conduire vers Paris par un canal de navigation à ciel ouvert un volume d’eau considérable emprunté au cours de la Loire. Ce fleuve est souvent trouble et tient toujours en suspension une certaine quantité de sable ; par compensation, ses eaux sont d’une pureté hydrotimétrique remarquable, ce qui les rendrait précieuses à l’industrie. Le canal dont il s’agit eût été pour la rive gauche de la Seine ce que le canal de l’Ourcq est pour la rive droite ; mais, lorsque ce projet fut étudié sur le terrain, les ingénieurs se heurtèrent à un chiffre de dépenses formidable. C’était un motif suffisant d’ajournement.

On s’est aussi demandé pourquoi l’alimentation hydraulique de Paris ne serait pas assurée au moyen d’un nombre suffisant de puits artésiens. Le puits de Grenelle ne donne que 600 mètres cubes par jour ; celui de Passy, creusé plus récemment et sur une large section, en fournit 8,000 mètres. Au lieu d’aller. chercher très, loin des sources ou des rivières et de les amener à grands frais, il pouvait paraître préférable de creuser quarante ou cinquante puits artésiens dans l’enceinte des fortifications. L’eau qui s’en écoule est plus pure que celle des terrains crayeux. Par malheur, elle est tiède, car elle sort en toute saison à la température de 28 degrés ; puis elle est fade, elle manque d’air et ne convient pas en somme pour la boisson. D’ailleurs l’art de forer les puits à 600 ou 700 mètres de profondeur n’est pas si parfait que l’on ait la certitude de réussir toujours, et, ce qui serait l’obstacle le plus grave, il paraît établi que des puits artésiens trop rapprochés se nuisent mutuellement. Le débit du puits de Grenelle s’est abaissé d’un tiers dès que