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vastes réservoirs établis sur les points culminans de la ville reçoivent et emmagasinent les eaux. Celui de Passy, à 50 mètres au-dessus de la Seine, peut contenir 37,000 mètres cubes, que refoulent les machines élévatoires du quai de Billy ; il reçoit aussi dans un compartiment spécial les eaux du puits artésien de Passy, destinées à l’arrosage du bois de Boulogne. Un réservoir sera construit à Montrouge à l’extrémité de l’aqueduc de la Vanne. Un troisième réceptacle vient d’être organisé sur les hauteurs de Ménilmontant, à 82 mètres au-dessus de la Seine ; il reçoit dans un premier bassin 31,000 mètres cubes d’eau de la Marne, que lui envoie l’usine à roues hydrauliques de Saint-Maur, et dans un second bassin 100,000 mètres cubes d’eau de la Dhuys, c’est-à-dire ce que l’aqueduc en amène en deux jours et demi, de sorte que l’écoulement peut être interrompu dans cette longue conduite souterraine sans que le service en souffre. Cette précaution a été prise en vue de prévenir les chômages que l’entretien de l’aqueduc et des siphons rendrait inévitables. Ce dernier réservoir est à une altitude telle qu’il alimente les quartiers les plus hauts de la rive droite. D’autres de moindre importance sont établis ou projetés sur différens points élevés. Autant que possible, chacun d’eux est rempli par deux sources séparées, afin d’éviter les interruptions accidentelles ; mais la distinction entre les eaux de source et celles de rivière est rigoureusement maintenue. De chaque réservoir part une conduite de distribution de 50 centimètres à 1 mètre de diamètre selon l’étendue du quartier qu’elle dessert ; sur cette conduite maîtresse s’en embranchent d’autres plus petites enfouies sous chaque voie publique et dont se détachent les tuyaux d’alimentation des maisons particulières ou des fontaines. Chaque rue doit posséder deux conduites distinctes, l’une pour le service public, l’autre pour le service privé. L’eau arrive à chaque orifice avec la pression que lui donne la hauteur du réservoir d’où elle provient ; ainsi dans les quartiers bas où cette pression est énorme, elle se laisse transformer en pouvoir moteur. Cette force naturelle d’un nouveau genre a déjà reçu maints emplois en diverses industries ; notamment pour l’élévation des fardeaux. L’exposition universelle en montre une application qui est l’un des succès de curiosité de cette grande exhibition.

En résumé, 140,000 mètres cubes d’eau de source d’une limpidité parfaite et d’une température constante, et 280,000 mètres d’eau de rivière’ lus ou moins altérée par les résidus de la vie animale et sujette aux vicissitudes des saisons, voilà le contingent quotidien dont les Parisiens jouiront bientôt. Paris méritera d’être comparé alors aux villes où l’alimentation hydraulique est la plus satisfaisante. Sans doute ce résultat n’aura été obtenu qu’au prix