Page:Revue des Deux Mondes - 1867 - tome 69.djvu/95

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

était antérieur à la publication du code Napoléon. Dans le concordat italien, la religion catholique avait été proclamée religion de l’état. Cette circonstance, aux yeux du Saint-père comme à ceux de son secrétaire, constituait à elle seule une énorme différence, et rendait à l’église romaine toute sa liberté d’action. Ses réclamations furent tout d’abord très énergiques. Peut-être y avait-il quelque chose d’un peu singulier et de passablement anormal dans l’attitude d’une puissance dont l’autorité est toute morale, et qui se croyait obligée à protester hautement, de ce côté des Alpes, contre un état de choses qui, la veille encore, sur l’autre versant, n’avait soulevé de sa part aucune sérieuse objection. Quoi qu’il en soit du fond des choses, le Vatican avait de plausibles réclamations à faire valoir à propos de la manière dont on s’était conduit envers lui. Il était en tout cas en droit de rappeler les engagement pris à son égard ; il n’eut garde d’y manquer. Par ordre du saint-père, son secrétaire d’état écrivit aussitôt au cardinal Caprara à Paris, et se hâta de passer une note officielle au cardinal Fesch à Rome. La teneur de ces deux documens faisait un peu contraste avec le ton que dans ses lettres particulières, depuis son séjour à Paris, Pie VII avait préféré prendre avec son ancien hôte des Tuileries. On sentait que cette fois c’était Consalvi qui tenait la plume. Sans amertume, sans reproches, sans entrer, si peu que ce fût, dans la voie des récriminations, l’ancien négociateur du concordat rappelait cependant avec fermeté et insistance les assurances tant de fois données par l’empereur lui-même. « Au sujet du concordat italien, sa majesté impériale avait déclaré à plusieurs reprises qu’il n’y avait pas lieu d’introduire en Italie, où il n’y avait pas de protestans, les dispositions que, par égard pour eux et en vue de la tranquillité commune, on avait adoptées en France. Dans le royaume d’Italie, la religion catholique était la religion d’état et de fait et de droit. Elle avait été proclamée telle dans la constitution et telle aussi dans les articles du concordat. La religion catholique cesserait pourtant d’être la religion de l’état, si l’état ne protégeait pas ses maximes les plus essentielles, si par un code nouveau il venait imposer tout à coup des règles qui étaient la négation même de ses droits les plus inviolables….. On avait donc surpris la bonne foi de l’empereur, ou, dans la multitude infinie des affaires qui occupaient sa vaste intelligence, il avait perdu de vue ce détail. Il suffirait certainement de faire appel à sa droiture ; jamais il ne voudrait porter un coup si fatal à la religion, et manquer à la foi due à une convention aussi sacrée que celle qu’il avait passée avec le saint-siège au sujet des affaires religieuses de l’Italie… Les devoirs de son ministère apostolique ne permettaient pas au saint-père d’étouffer le cri de douleur que lui arrachaient les blessures faites à la religion. Pour les guérir, il