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En résumé, la Prusse nouvelle contient 35 millions d’hectares et 23,590,000 habitans. La densité de la population est ainsi de 67 habitans par kilomètre carré, ce qui correspond à peu près à celle de la France. Pour la qualité du sol, la France l’emporte, de beaucoup, car en Prusse un quart de la superficie au plus peut être considéré comme bonne terre à froment et un autre quart comme terre à seigle ; la dernière moitié donne encore des produits, mais ils sont plus que médiocres. Le climat aussi est bien moins favorable que de ce côté-ci du Rhin. La longueur des hivers, la brièveté de la bonne saison, entravent les progrès de la culture et la rendent plus onéreuse en réduisant à l’inaction pendant longtemps les forces humaines et animales employées aux travaux agricoles. Il est une circonstance qui compense en partie ces désavantages ? tandis que dans la moitié de la France qui s’étend au sud de la Loire la sécheresse des étés nuit, à défaut d’irrigations, au développement des cultures fourragères et par suite à l’élève du bétail, partout en Prusse l’abondance des pluies et des sources favorise l’extension des prairies naturelles et artificielles. Or, maintenant que la concurrence des blés russe et américain forcé, le cultivateur à demander aux animaux domestiques ses principaux profits, la facilité de leur donner une abondante nourriture constitue un précieux avantage.

Ces influences climatériques ne peuvent manquer de se traduire dans la répartition des cultures. La Prusse, sur ses 31 millions d’hectares productifs, en a 17 en terres arables et jardins, 6 en prairies et pâturages, 8 en bois. La France, sur 43 millions, en a 37 en terres arables et vignes[1], 8 en bois et 4 seulement en prés, auxquels il faudrait joindre cependant encore au moins 3 millions d’hectares de pâturages comptés parmi les 10 millions de terre inculte, mais que les Allemands rangeraient aussi sous la dénomination de weiden. La France a donc deux fois autant de terre arable que la Prusse, pas plus de bois et guère plus de prairies ; aussi produit-elle relativement plus de céréales, beaucoup plus de vin, mais moins de beurre et de viande. On estime que la Prusse ancienne produisait 9 millions d’hectolitres de froment, 38 millions de seigle, 9 millions : d’orge, 44 millions d’avoine, et 80 millions de pommes de terre. La consommation par habitant est portée en moyenne à 40 kilogrammes de froment, 135 kilogrammes de seigle, 34 kilogrammes d’autres céréales et de légumineuses, et 288 kilogrammes de pommes de terre, 20 kilogrammes de viande et 14

  1. Je compte comme terre arable les racines et les prairies artificielles, parce que ces cultures rentrent dans l’assolement des terres que travaille la charrue.