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dîme. Ailleurs, un droite qu’on appelle le droit de pile aboutit à un résultat analogue. Cette prérogative singulière paraît tirer son nom de l’usage où l’on est, au moment de la moisson, d’enfermer, d’empiler chaque soir le blé battu dans un magasin spécial, dont le propriétaire ferme la porte et conserve la clé. Le dernier jour de la besogne, après l’opération du vannage, on tire de la pile la quantité de grain jugée nécessaire pour les semailles de la saison suivante, quantité qui se trouve ainsi fournie par moitié, puisqu’elle provient du lot commun ; mais ensuite on prélève au profit du propriétaire une mesure de blé égale à celle qu’on a prise pour la reproduction. Tel est le droit de pile, évidente dérivation de l’ancien droit seigneurial. Pour les fruits des vignes exploitées sous forme de métayage, les procédés sont plus simples, quoique la part du tenancier ne soit pas toujours de la moitié de la récolte. D’ordinaire le vin blanc se fait chez le propriétaire, et on divise la cuvée suivant les clauses du contrat. Pour le vin rouge, c’est le raisin qu’on partage.

Les produits de l’étable, tout le profit des bestiaux, gros et menus, comme disent les anciens baux dans le Périgord, constituent aussi un fonds partageable, rien de plus naturel. Il en est de même pour les gros produits de la basse-cour, comme les oies, comme les dindons. Quant aux articles d’une importance moindre, tels que les œufs, la somme d’une redevance fixe se substitue le plus souvent à celle d’un partage. Fort élastique de sa nature, le chapitre dès redevances s’est longtemps prêté à de réels abus, dont je n’ai point trouvé de trace, je ne dirai pas dans le domaine de Montaigne, administré suivant toutes les conditions progressives que la situation comporte, mais même dans les métairies environnantes. Je n’oserais affirmer cependant qu’on en soit partout affranchi. Parmi les abus de cette espèce dont j’ai relevé quelques exemples dans les vieux titres, en voici un qui donnera l’idée des autres. Le métayer s’obligeait à faire non-seulement, ce qui va de soi-même, « tous les charrois requis et nécessaires dans la métairie ; lui mais encore « tous ceux dont le bailleur aura légitimement besoin en son particulier. » Quelle porte ouverte à l’arbitraire ! Les mots légitimement et en son particulier n’excluent évidemment que les charrois sans but et ceux qui seraient exécutés pour de tierces personnes.

Cet exemple n’autorise point à conclure d’une manière générale que la résidence du propriétaire à portée de sa métairie rende plus difficile la situation du tenancier ; ce qui paraît vrai, c’est que le chapitre des redevances s’étend alors davantage en se substituant à d’autres clauses. Les conditions les plus dures, je les ai trouvées dans des baux consentis non par de grands propriétaires habitant