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seconde partie du problème est à l’étude. Il n’est pas impossible que les eaux des égouts de Paris soient consacrées à l’arrosage des terres, comme cela se fait dans les Craigentinny meadows d’Edimbourg depuis longtemps, et aux environs de Londres depuis peu d’années. Toutefois nous devons montrer en quelques mots combien la question se complique quand il s’agit de la capitale de la France, d’une ville de près de 2 millions d’habitans. Les eaux se trouvent, au débouché d’Asnières, à un niveau si bas que très peu de champs pourraient les recevoir de premier jet, et ces champs sont de même que toutes les terres des environs de Paris, morcelés en une infinité de parcelles qui n’admettraient pas toutes ce mode d’arrosage. Serait-il possible de déféquer ces eaux par un mélange avec des réactifs chimiques et de réduire à un petit volume le précieux engrais qu’elles recèlent ? Mais on a objecté que l’ammoniaque, gaz éminemment volatil, qui est le principe essentiel au point de vue agricole, s’évaporera en grande partie pendant la durée de ces manipulations chimiques, et que le résidu livré à la terre ne gardera, comme les produits de la voirie de Bondy, qu’une minime fraction d’effet utile. D’ailleurs on ne doit pas oublier que le grand collecteur débite 200,000 mètres cubes par vingt-quatre heures, lors même que le courant n’en est pas accru par les pluies. Rien que la construction des bassins de dépôt propres à emmagasiner cette énorme masse serait une difficulté sérieuse. Il serait donc permis de ne pas avoir confiance en l’efficacité des désinfectans et de s’effrayer des obstacles que rencontrerait l’exécution d’un tel projet, s’il n’était appuyé et recommandé par d’illustres savans. les Égyptiens connaissaient de toute antiquité la propriété que possède l’alun de clarifier les eaux troubles, et ils l’employaient pour rendre potables les eaux limoneuses du Nil. L’alun coûte cher, mais le sulfate d’alumine, qui en est la base, peut être obtenu à très bon marché, si l’on en fabrique de grandes quantités par des procédés industriels. Les liquides, brassés avec une faible dissolution de cette substance, s’épurent en quelques minutes ; les détritus tombent au fond et peuvent être recueillis à part ; l’eau, redevenue claire et débarrassée de la presque totalité des matières putrescibles, peut être rejetée dans le fleuve sans inconvénient ou employée, si on le préfère, à des irrigations. Les expériences qui se poursuivent démontreront si ce système d’épuration est efficace.

Une autre solution, conçue sur un plan plus large, a été présentée par un ingénieur des ponts et chaussées, M. Mille. Le bassin de la Seine est, dit-il, une alluvion maigre et peu fertile, qui ne porte guère qu’une végétation forestière ; les bois de Boulogne et du Vésinet, la forêt de Saint-Germain, témoignent que ces champs de