nergique et courageux ministre croit possible un mouvement symétrique dans le budget ordinaire d’augmentation des recettes et de diminution des dépenses. Il n’établira d’ailleurs aucun impôt nouveau avant 1869, se proposant de solder les services de 1867 et 1868 par les ressources extraordinaires. M. Ferrara pense à réaliser des économies importantes dans les services administratifs ; il réduira le nombre des préfets de 59 à 40 ; il diminuera aussi le nombre des universités, ce qui est, à ce qu’il paraît, compatible en Italie avec une meilleure organisation de l’instruction publique. Quoi qu’il en soit, l’exposé financier de M. Ferrara a produit une impression favorable. Il faut que les Italiens comprennent bien que pour eux le seul homme nécessaire aujourd’hui est un ministre des finances. Si M. Ferrara est ce ministre, ils feront bien d’être dociles à ses conseils et de le garder.
M. Duvergier de Hauranne avance avec une vigueur soutenue dans sa grande œuvre historique. Le huitième volume de son Histoire parlementaire vient de paraître. Si l’on pouvait ne regarder qu’aux mérites de ce livre, à l’abondance des recherches, aux informations inédites qui ouvrent des jours nouveaux sur le caractère des hommes publics et la marche accidentée des partis, aux vifs et fidèles résumés des débats parlementaires, peu de lectures présenteraient un intérêt plus solide et plus varié. Cependant à travers ces récits, ces portraits et ces discussions c’est la destinée politique de la France qui s’agite ; on ne peut l’oublier, et on ne peut non plus se défendre d’une douleur poignante quand on voit les absurdités, les folies qui ont sous la restauration empêché la France de s’approprier définitivement les institutions constitutionnelles. C’est la période la plus agitée et la plus réactionnaire du cabinet de M. de Villèle que nous raconte le huitième volume ; nous sommes là en plein dans la loi du sacrilège, dans le droit d’aînesse, dans le travail de la congrégation. L’ivresse des vieilles idées, des idées contraires aux principes et à la nature des sociétés modernes, transporte le parti dominant et le mène à la ruine. Ce qui effraie dans cette lecture, c’est qu’elle nous apprend qu’il y a des infatuations, des difformités d’intelligence qui sont inguérissables, et qu’on voit reparaître à chaque génération nouvelle. Le temps actuel ne reproduit-il pas une grande partie des aberrations qui ont perdu la restauration ? On passe en regardant avec un sentiment de pitié ou de moquerie devant ces « ailes de pigeon, » ennemis acharnés et ridicules de la liberté, fauteurs aveugles de tous, les complots du despotisme contre l’esprit moderne ; mais quand on ramène sa pensée vers le présent, a-t-on le droit de s’enorgueillir au nom des temps actuels de la comparaison des deux époques ? Quand, par exemple, on est obligé de lire les amendemens présentés au projet de la loi sur la presse par certains de nos députés rétrogrades, est-on bien venu à railler ou à maudire ces pauvres ultras de la restauration mis en démence par le fanatisme absolutiste ?