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cadran indicateur passait pour une merveille ? Ils n’ont pas duré deux mois. Pour contrôler la probité des cochers, la préfecture de police et la Compagnie générale ont imaginé divers moyens qui approchent du but, mais qui ne l’atteignent pas.

A chacune des 158 places disséminées dans Paris, un surveillant est attaché ; de cinq minutes en cinq minutes, il doit inscrire le numéro des voitures qui sont à la station, veiller à ce que les deux cochers qui sont en tête ne donnent pas à manger à leurs chevaux et à ce qu’ils ne les quittent pas sans permission. Dès qu’un fiacre s’éloigne, on note sur un carnet l’heure exacte de son départ, comme déjà l’on a écrit le moment de son arrivée. Par la comparaison du carnet des surveillans et de la feuille tenue par le cocher lui-même, on a déjà un point de repère pour vérifier les erreurs. Cette organisation, qui est excellente et qui a déjà rendu de grands services à la population parisienne, appartient à la préfecture de police. De son côté, la Compagnie générale a des inspecteurs mobiles qui visitent les stations, relèvent les numéros qui s’y trouvent, parcourent les rues, visent la feuille des cochers arrêtés aux portes, prennent note de ceux qu’ils voient charger sur la voie publique, interrogent parfois les personnes qui quittent les voitures et font chaque soir un rapport sur les observations qu’ils ont recueillies dans la journée. C’est un troisième moyen de contrôle ; mais il en est un quatrième que les cochers redoutent singulièrement, car ils en ignorent le mécanisme. La Compagnie générale a une police secrète parfaitement installée, fonctionnant régulièrement, qui forme une véritable administration, dont le siège est situé dans un des quartiers élégans de Paris. Les agens de cette surveillance occulte se mettent en rapport avec les personnes que leurs fonctions obligent à prendre souvent des voitures. Moyennant des conventions que l’on peut soupçonner[1], ces personnes remettent à l’agence secrète la carte des voitures qu’elles ont employées, après avoir eu soin d’y écrire le nombre exact d’heures et de minutes qu’elles ont payées. Ces cartes, adressées à la Compagnie générale, sont mises en regard de la feuille des cochers ; si

  1. Voici la copie de la circulaire envoyée par l’agence secrète : « Monsieur, pour chaque voiture faisant partie des séries de numéros ci-dessous indiqués, prise à l’heure et occupée une heure quinze minutes au moins, il sera remboursé 1 fr. 25 cent. pour les voitures prises en station, 1 fr. 50 cent, pour celles prises en raccroc, si on remplit le bulletin ci-joint d’après les indications qui y sont portées, et si dans les vingt-quatre heures on le fait parvenir sous enveloppe affranchie à l’adresse ci-dessous. Quant aux voitures prises à la course, il sera traité de gré à gré. Les remboursemens se feront du 15 au 20 de chaque mois, rue X…, et du 27 au 30 au domicile de la personne qui aura employé la voiture. » Suivent la signature, les numéros des voitures, le tarif et un bulletin formulé indiquant les heures et le prix du travail.