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absolument et de réduire presque à néant les états du souverain dont la condition misérable venait, un instant auparavant, d’exciter sa pitié. Il avait pris dans ses conférences avec M. d’Haugwist une sanglante revanche des hésitations trop évidentes de la Prusse et de son alliance projetée avec l’Angleterre en lui imposant l’obligation de se brouiller maintenant avec elle par l’invasion des états du roi de Hanovre. La trahison, non pas seulement méditée, mais accomplie de la reine Caroline, avait reçu son châtiment par l’apparition du décret qui avait appris à l’Europe étonnée que la branche des Bourbons de Naples « avait cessé de régner. » L’électeur de Bavière, élevé à la dignité de roi, avait été récompensé de sa fidélité à la France par l’octroi du Tyrol et d’une notable partie des possessions héréditaires de la maison d’Autriche. Ces actes multipliés d’une souveraine omnipotence qui ne connaissait plus d’autres limites que celles de sa propre convenance s’étaient accomplis avec la plus extrême facilité. Ce n’est pas tout. Comme il entrait dans les vues de l’empereur de faire marcher désormais d’un même pas l’agrandissement de sa puissance et celle des membres de sa famille, il ne s’était arrêté quelque temps à Munich que pour y conclure le mariage de son fils adoptif, Eugène Beauharnais, vice-roi d’Italie, avec la princesse Auguste de Bavière. L’alliance de cette princesse avait été arrangée primitivement par sa mère avec l’héritier de l’électorat de Bade ; mais il en était des filles des électeurs de l’Allemagne ainsi que de leurs provinces, Bonaparte en disposait à son gré. La future reine de Bavière avait dû faire taire ses répugnances ; le prince badois avait retiré ses prétentions à la main de la princesse Auguste, et recevait en dédommagement celle de Mlle Stéphanie Beauharnais, reconnue pour princesse de la maison impériale de France ; enfin l’empereur mettait pour la première fois en avant l’idée du mariage de la fille de l’électeur du Wurtemberg avec le prince Jérôme. Est-il besoin d’ajouter que celui qui distribuait ainsi les couronnes en Allemagne ne trouvait plus de rebelles parmi ses propres frères ? Le plus récalcitrant d’entre eux, Joseph, s’était décidé à ceindre la couronne de Naples, et venait de recevoir de Schœnbrunn l’invitation d’aller la conquérir à la tête d’une armée française maintenant dirigée sur le midi de l’Italie. Le prince Louis ne montrait plus de répugnance à aller régner sur les Hollandais, à la condition, toujours maintenue cependant, qu’on lui permettrait d’y emmener sa femme. Ces exemples d’une si méritoire obéissance avaient rencontré partout des imitateurs. Il n’y avait pas un ordre, pas un secret désir de l’empereur qui, en France, en Allemagne, en Italienne fût alors aussi vite accompli que connu ou seulement pressenti. A Paris, l’inquiétude avait promptement fait