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chaîne de Nilgiri. Ce sont les mêmes cimes arrondies, les mêmes jungles couvrant des étendues de plusieurs milles et cessant tout à coup les montagnes, de forme conique, sont couvertes d’un riche gazon et d’abondantes plantes médicinales. Trois tribus distinctes habitent la chaîne de l’Anamalaï : les Kaders, les Paliars et les Malsars. Les Kaders sont supérieurs aux autres ; ils se refusent à tout travail domestique, et c’est par faveur qu’ils consentent à conduire des voitures ou à charrier du bois. Ils sont habiles chasseurs et considèrent comme une injure d’être appelés coulies. Ils sont confians et obligeans et exercent une certaine influence sur les Paliars et les Malsars. D’une stature peu élevée, ils ressemblent à des Africains avec leurs cheveux crépus liés par derrière ; ils liment en pointe les quatre dents de devant de leur mâchoire supérieure. Les Paliars sont surtout pasteurs et marchands, tandis que les Malsars s’adonnent à l’agriculture. Leur commerce consiste à échanger les produits de ces montagnes, tels que le safran, le gingembre, le miel, la cire, la résine, le millet, la noix à savon, la noix de galle, contre ceux de la plaine, le riz, le tabac. Ils sont très habiles à grimper sur les arbres et à escalader les rochers escarpés pour chercher du miel ; ils se servent à cet effet de chaînes en rotin fixées à la partie supérieure et suspendues sur l’abîme. Ils n’ont d’ailleurs aucune idée de ce que c’est que le bien-être et n’aspirent nullement à changer leur sort. Ces tribus ne s’établissent pas à une altitude supérieure à 5,000 pieds ; les sommets restent le domaine exclusif des animaux sauvages.

C’est la fin d’octobre et la saison des chaleurs qui paraissent être les meilleurs momens pour s’aventurer dans la chaîne supérieure. Celle-ci étant soumise par sa position à l’action de la mousson du sud-ouest, M. Cleghorh propose d’y établir une station semblable à celles qu’on a créées sur d’autres montagnes, et où les Européens viendraient refaire leur constitution énervée. On sait en effet que le climat de l’Inde est mortel pour eux. L’extrême chaleur des jours, jointe à la fraîcheur des nuits, finit par ruiner les tempéramens les plus robustes malgré les soins les plus attentifs et la vie la plus régulière. Pour lutter contre cette influence pernicieuse, le gouvernement a créé dans les montagnes un certain nombre de stations sanitaires où les malades viennent se retremper dans une atmosphère moins embrasée.


II

Nous avons dit en commençant que, pour tirer des forêts de l’Inde les produits qu’elles peuvent fournir, et tout à la fois en assurer la