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MM. Sella, Matteucci, etc., vinssent renforcer le cabinet. Le baron Ricasoli a compris cette indication de l’opinion ; il s’est adressé à M. Rattazzi, mais il ne lui a offert que le ministère de la justice. Le portefeuille de l’intérieur est le seul que sa position politique lui permette d’accepter sous la présidence du baron Ricasoli. Les négociations n’ont point encore produit de résultat. Il ne faudrait point que cette indécision se prolongeât ; il importe que le ministère travaille à sa prompte reconstitution dès que le vote des douzièmes provisoires aura été obtenu. Toute l’efficacité du ministère italien et de la chambre qu’il doit diriger dépendra de la compétence du ministre qui aura le portefeuille des finances, et de la résolution avec laquelle le pays et ses représentans s’appliqueront à mettre fin aux embarras du trésor. Le gouvernement et la nation doivent dire adieu aux utopies et aux chimères. L’Italie a certainement dans la liquidation des biens ecclésiastiques les élémens d’une opération financière qui atténuera ses déficits ; mais, pour rapprocher le niveau des dépenses de celui des recettes, le moyen le plus sûr, c’est la réduction des dépenses et l’énergique économie. L’Italie ferait bien d’étonner le monde par une diminution radicale de son armée ; ses généraux crieraient un peu, mais l’Italie n’a plus besoin de généraux et de soldats pour conquérir son indépendance : elle a besoin de ministres économes pour fonder enfin son existence comme nation politique sur l’équilibre exact et régulier de ses besoins et de ses ressources.

La question de la réforme vient de prendre en Angleterre un tour qu’on n’aurait point osé prévoir au début de la session. Il y avait à propos de la réforme parlementaire une opinion générale dans la société anglaise, c’est qu’il importait de résoudre cette question difficile le plus tôt possible et cette année même. Il semblait que la présence au pouvoir du parti tory devait aider à l’arrangement de la question électorale, si le ministère comprenait l’importance du service qu’il rendrait ainsi à la paix publique de l’Angleterre, s’il avait assez d’ascendant sur son parti pour le déterminer à former une majorité pour un système définitif de réforme, en s’unissant aux élémens modérés du parti libéral. On désespéra d’arriver à ce résultat ; on fut saisi d’un découragement profond quand on vit la marche embarrassée du ministère. Au lieu d’un projet de loi intelligible et saisissable, M. Disraeli ne proposa d’abord qu’une vague et compliquée déclaration de principes. La chambre et l’opinion furent prises d’un accès de mauvaise humeur contre ce malheureux cabinet qui allait perdre une occasion unique de terminer l’affaire de la réforme et de mettre fin à une agitation importune. Cependant, tout en blâmant le ministère, on l’invitait à renoncer à sa lourde procédure, on l’engageait à présenter un bill, on souhaitait visiblement qu’il se prêtât à fournir le thème d’une loi que la chambre, renonçant aux calculs de partis, se chargerait d’achever au besoin par des amen démens dans la discussion des articles, et de conduire par les compromis nécessaires au point où elle serait la-résultante approximative des