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nio de Leyva depuis l’éloignement de Lautrec. Traversant ensuite ce fleuve, il s’était avancé vers l’Adda, et il avait opéré sa jonction avec le duc d’Urbin et le duc Francesco Sforza. Les troupes combinées de la France, de Venise et du duc de Milan s’étaient alors portées devant Pavie pour en faire le siège. Elles étaient autour de cette place, si souvent assaillie et emportée, quand la nouvelle de l’entreprise heureuse d’André Doria sur Gênes et la demande de secours du maréchal Trivulzi, enfermé dans le castelletto, arrivèrent au comte de Saint-Pol. Avant de secourir le castelletto et d’aller menacer Gênes, le comte de Saint-Pol tint à reprendre Pavie. Serrée de près et battue en brèche, la ville fut enlevée d’assaut sans que Antonio de Leyva, qui se sentait trop faible, osât s’avancer pour la défendre.

Pavie prise et de nouveau rendue à Francesco Sforza, le comte de Saint-Pol marcha vers les montagnes qui entourent Gênes avec deux mille hommes de pied et cent hommes d’armes. Cette troupe, qu’il n’avait sans doute pas voulue plus nombreuse afin d’arriver plus vite, n’était pas assez forte pour réduire Gênes, mise en état de défense. Parvenu sans vivres et sans artillerie à Cavi, dans le commencement d’octobre, le comte de Saint-Pol trouva les passages de l’Apennin si bien gardés, qu’il ne put pas même introduire de secours dans le castelletto. Il put seulement envoyer trois cents hommes de renfort à Savone, et il retourna en Lombardie avec le reste.

Les Génois, délivrés de cette crainte, allèrent attaquer Savone. André Doria se présenta avec ses galères devant le port de cette malheureuse ville, qu’assaillirent du côté de la terre les troupes de Gênes, qui l’avait redoutée comme une rivale et qui la détestait comme une rebelle. Le commandeur Morette, à qui François Ier en avait donné le gouvernement, y résista mal et peu de temps. Malgré les supplications des courageux habitans, qui demandaient à se défendre, sachant bien quel sort leur était réservé s’ils tombaient au pouvoir de leurs anciens et implacables dominateurs, Morette capitula le 21 octobre. Les Génois démantelèrent les fortifications de Savone, qu’ils remirent sous leur dure sujétion. Peu de temps après en être redevenus maîtres, ils prirent aussi possession du castelletto, où le maréchal Trivulzi, ayant perdu tout espoir d’être secouru et manquant de vivres, capitula à son tour le 28 octobre. Tous les honneurs de la guerre furent accordés au maréchal et à sa troupe par les Génois, trop heureux d’éloigner des ennemis que leur voisinage laissait inquiétans et de reprendre une citadelle qui pouvait redevenir menaçante. Dès ce jour fut consommée la révolution qui arracha pour toujours l’état de Gênes à la domination