Page:Revue des Deux Mondes - 1867 - tome 68.djvu/406

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

grand royaume du sud si avant qu’on l’avait cru regagné par le roi de France et perdu pour l’empereur, cette puissante armée s’était fondue devant Naples et venait d’être achevée dans Aversa. Il n’en restait plus rien, et le prince d’Orange, après avoir écrit le 9 septembre tout ce qui s’était passé à Charles-Quint, de nouveau triomphant par la constance heureuse de ses généraux et la vigueur quelquefois indocile, mais toujours inébranlable de ses soldats, ajoutait : « Sire, les choses de la guerre de ce côté peuvent se dire véritablement terminées. Le peu d’ennemis qui restent dans les Abruzzes et dans la Fouille doit être dispersé à cette heure ou le sera bientôt. Les galères des ennemis ont quitté ces parages et ont mis à la voile, celles des Français pour se rendre à Marseille, et celles des Vénitiens pour retourner dans l’Adriatique. J’ai ordonné à André Doria d’aller attaquer là où il pensera le faire avec plus d’avantage. Il est parti diligemment et dans les meilleures dispositions, de sorte que par mer et par terre ce royaume sera entièrement délivré... Que Dieu garde la royale vie et l’impériale puissance de votre majesté, les rende prospères et les exalte comme il se désire ici[1]. »


VI.

A la ruine d’une armée et à la perte de toute espérance dans le sud de l’Italie s’ajouta bientôt, pour François Ier, un grand revers au nord de cette péninsule. La seigneurie de Gênes lui fut enlevée, et il perdit tout le littoral de la Ligurie. André Doria était venu attendre à Gaëte la ratification du traité qu’il avait conclu avec l’empereur. Dès que cette ratification fut arrivée, il se mit au service de Charles-Quint, qui le fit bientôt prince de Melfi, et il se dirigea des côtes de Naples vers la ville de Gênes. Il s’entendait depuis longtemps et en secret avec les principaux des divers partis qui avaient divisé la république, et qui, las de désaccord et de sujétion, souhaitaient également l’union et l’indépendance. Tout était prêt pour une révolution dans la ville, instruite du traité conclu avec l’empereur et disposée à seconder l’entreprise qui devait la rendre libre, lorsque André Doria entra dans le port le 12 septembre 1528; il avait arboré le pavillon de l’empereur, celui-là même que son neveu avait glorieusement enlevé à Moncada dans le golfe de Salerne. Ses troupes, débarquées sur les quais et formant deux petits corps sous la conduite de Philippino Doria et de Christophe

  1. Lettre du prince d’Orange à Charles-Quint, du 9 septembre 1528. — Archives impériales et royales de Vienne.