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avait de navires légers dans le port de Naples. Il y mit six cents arquebusiers espagnols[1] choisis parmi les tireurs les plus expérimentés. Ancien amiral de Charles-Quint Ugo de Moncada prit le commandement de cette flotte, sur laquelle montèrent avec lui le marquis del Guasto, le grand-écuyer Ferramosca, le connétable du royaume Ascanio Colonna et beaucoup d’autres gentilhommes d’élite. Il s’avança ainsi vers la pointe du golfe de Salerne, ou il espérait assaillir à l’improviste Philippino Doria et l’accabler

Mais l’habile Génois ne devait pas être pris au dépourvu. Instruit de l’armement de Moncada et de son projet d’attaque, il s’était mis en mesure de le bien recevoir. Ses galères étaient pourvues d’une artillerie plus forte que celle des galères espagnoles ; elles étaient mieux manœuvrées, et il y avait placé trois cents bons arquebusiers que lui avait envoyés Lautrec[2]. Le combat s’engagea vers quatre heures après midi avec une vigueur extrême de part et d’autre le 28 avril. Il dura jusqu’à la nuit. L’acharnement y fut égal, et l’issue en resta assez de temps incertaine. Les deux galères capitanes sur lesquelles étaient Ugo de Moncada et Philippino Doria s’approchèrent et se combattirent à outrance. Un gros canon appelé le Basilic, placé sur le pont de la galère génoise, fit par sa décharge de grands ravages sur la galère napolitaine, ou les coups d’une artillerie bien servie et bien pointée abattirent beaucoup de monde. Cependant les navires, chargés de canonniers et d’arquebusiers qui se foudroyaient des deux côtés, étaient toujours aux prises après plusieurs heures de combat et de grandes pertes sans que la victoire se fût encore déclarée, lorsque trois galères génoises qui s’étaient d’abord éloignées de la bataille vinrent y prendre part. Sur l’ordre de Philippino Doria, ces trois galères détachées des huit avaient pris le large pour s’y tenir comme en réserve puis au moment décisif elles s’étaient jetées sur les derrières de

  1. « Parve a don Ugo de armare le sey galère de V. Mts quale erano quà inieme con alcune fuste, fregate et brigantini che erano in questo porto per andare a la expugnatione dei inimici et levati sei cento archibuser, spagnoli de quelli de lo exercito. Lui stesso se misse in ditte galere… et a li XXVIII del presente se incontra con ditti inimici. » — Lettre du prince d’Orange à l’empereur, du 30 avril 1528. — Archives impériales et royales de Vienne.
  2. « … J’avois envoyé le Croq avec trois cens harquebusiers pour se mettre en vos galères et y arrivèrent si bien à point que VIII heures après qu’ils furent embarqués les ennemys vindrent pour les assaillir avec six galleres, quatre fustes, quatre brigantins et davantage avoient dix-huit ou vingt frégattes et autres petits vaisseaux tous chargez qui battoient vos galleres par flanc… et vous advise que la fleur de leurs arquebusiers y estoient… Le combat, sire, dura quatre grosses heures. » — Lettre de Lautrec au roi, du 30 avril 1528, écrite du camp devant Naples. — Mss. français, vol. 2993, f° 115.